L’influence majeure de Frank Lloyd Wright sur l’architecture japonaise
Pendant son séjour au Japon, l’architecte visionnaire américain a inspiré d’autres créateurs. Leur travail est empreint de sa philosophie
Karen Severns
10 juillet 2016
Il y a dix ans, je terminais un documentaire sur Frank Lloyd Wright qui osait suggérer – et tentait de prouver – qu’il a autant influencé les architectes japonais que leurs ancêtres l’ont inspiré.
Bien sûr, le concept d’influence est abstrait et peu d’artistes sont prêts à admettre que leur travail s’inspire de quelqu’un d’autre. Frank Lloyd Wright lui-même insiste sur le fait que ce sont l’esthétique et l’art japonais, et non l’architecture, qui l’ont le plus inspiré. Il était envoûté par les ukiyo-e, ces estampes gravées sur bois de la fin des années 1880, un mode d’expression artistique d’un grand raffinement. Il vantait aussi le « caractère organique » du design japonais : « Leur art était proche de la terre et produisait des œuvres propres à leur mode de vie et à leur travail et, par conséquent, presque plus modernes que tout ce qu’il m’a été donné de voir dans n’importe quelle civilisation européenne. »
Frank Lloyd Wright a continué à travailler au Japon jusqu’au début du XXᵉ siècle. Il laissera une marque indélébile sur cette nation qu’il admire presque autant que la sienne. Les apprentis architectes qui ont travaillé avec lui ont intégré les idéaux de Wright à leur propre travail, apportant ainsi une contribution significative à l’architecture qu’ils ont ensuite transmise à leurs successeurs. Aujourd’hui, l’esprit de Wright subsiste aussi bien dans les maisons japonaises historiques que dans les constructions contemporaines.
Bien sûr, le concept d’influence est abstrait et peu d’artistes sont prêts à admettre que leur travail s’inspire de quelqu’un d’autre. Frank Lloyd Wright lui-même insiste sur le fait que ce sont l’esthétique et l’art japonais, et non l’architecture, qui l’ont le plus inspiré. Il était envoûté par les ukiyo-e, ces estampes gravées sur bois de la fin des années 1880, un mode d’expression artistique d’un grand raffinement. Il vantait aussi le « caractère organique » du design japonais : « Leur art était proche de la terre et produisait des œuvres propres à leur mode de vie et à leur travail et, par conséquent, presque plus modernes que tout ce qu’il m’a été donné de voir dans n’importe quelle civilisation européenne. »
Frank Lloyd Wright a continué à travailler au Japon jusqu’au début du XXᵉ siècle. Il laissera une marque indélébile sur cette nation qu’il admire presque autant que la sienne. Les apprentis architectes qui ont travaillé avec lui ont intégré les idéaux de Wright à leur propre travail, apportant ainsi une contribution significative à l’architecture qu’ils ont ensuite transmise à leurs successeurs. Aujourd’hui, l’esprit de Wright subsiste aussi bien dans les maisons japonaises historiques que dans les constructions contemporaines.
La fraîcheur du soir à Shijo-Kawara, 1853, estampe d’Ando Hiroshige. Photo reproduite avec l’autorisation de la Frank Lloyd Wright Foundation
L’architecture organique de Frank Lloyd Wright
Dès le lancement de son propre cabinet à Chicago en 1893, Frank Lloyd Wright développe une pensée architecturale organique marquée par la tradition japonaise du « refus de l’anecdotique ». Ses maisons de la prairie (les Prairie Houses) portent des similitudes philosophiques indéniables avec les résidences traditionnelles japonaises : l’échelle à dimension humaine, la relative simplicité, les tons chauds, le respect des matériaux naturels et l’intégration de la maison au jardin. Mais ici s’arrête la comparaison.
L’architecture organique de Frank Lloyd Wright
Dès le lancement de son propre cabinet à Chicago en 1893, Frank Lloyd Wright développe une pensée architecturale organique marquée par la tradition japonaise du « refus de l’anecdotique ». Ses maisons de la prairie (les Prairie Houses) portent des similitudes philosophiques indéniables avec les résidences traditionnelles japonaises : l’échelle à dimension humaine, la relative simplicité, les tons chauds, le respect des matériaux naturels et l’intégration de la maison au jardin. Mais ici s’arrête la comparaison.
La Coonley House de Frank Lloyd Wright, lithographie tirée du portfolio Wasmuth, publié en 1910 sous le titre Ausgeführte Bauten und Entwürfe von Frank Lloyd Wright. Photo reproduite avec l’autorisation de la Frank Lloyd Wright Foundation
Une révolution résidentielle
Les maisons de Frank Lloyd Wright sont longues et basses, elles embrassent la terre et fusionnent physiquement et spirituellement avec les paysages des prairies du Midwest américain. Leur conception cruciforme et ouverte libère l’espace et le mouvement d’une manière dynamique typiquement américaine. Elles donnent l’impression d’être à la fois intimes et tentaculaires. La manière qu’a l’architecte de se concentrer sur la cheminée, qu’il place au centre de la maison comme un signe fédérateur de la vie familiale est tout aussi américaine. Il crée des murs de vitraux qu’il nomme des « écrans de lumière » et maîtrise le porte-à-faux comme personne avant lui.
Tout au long de sa carrière, l’insistance de Frank Lloyd Wright à concevoir des résidences pratiques, admirables et dans lesquelles on peut s’épanouir résonne aujourd’hui profondément avec le défi architectural mondial de créer des demeures confortables, durables et économes en énergie.
Au Japon, on trouve aujourd’hui de puissants échos de la révolution résidentielle de Frank Lloyd Wright dans les maisons conçues par des architectes comme Kazuyo Sejima, Kengo Kuma et Takaharu Tezuka. Ils sont, eux aussi, salués pour une mise en œuvre harmonieuse qui tient compte du climat et de l’impact environnemental, pour leurs techniques innovantes de construction, leurs technologies et leur vision originale.
D’ailleurs, des architectes continuent, partout au Japon, d’être inspirés par les idéaux qu’incarne le travail de l’architecte américain. « Wright a toujours pensé à la nature d’une manière pratique et non pas de façon abstraite », précise Kengo Kuma. « Quand il utilise des matériaux naturels, ils prennent soudain vie. Sa vision est brillamment prémonitoire. Aujourd’hui plus que jamais, après l’arrivée des “machines à habiter” de Le Corbusier qui nous ont opprimées, l’étude des bâtiments de Wright est une excellente occasion pour nous d’apprendre de quoi est faite la réalité. »
Takaharu Tezuka évoque l’obsession de Frank Lloyd Wright pour le confort : « Les résidents des maisons conçues par Wright n’ont jamais eu à vivre dans des espaces froids à l’atmosphère rationnelle. Quand il crée des espaces confortables, ils deviennent naturellement durables. Nous avons encore beaucoup à apprendre de lui. »
Une révolution résidentielle
Les maisons de Frank Lloyd Wright sont longues et basses, elles embrassent la terre et fusionnent physiquement et spirituellement avec les paysages des prairies du Midwest américain. Leur conception cruciforme et ouverte libère l’espace et le mouvement d’une manière dynamique typiquement américaine. Elles donnent l’impression d’être à la fois intimes et tentaculaires. La manière qu’a l’architecte de se concentrer sur la cheminée, qu’il place au centre de la maison comme un signe fédérateur de la vie familiale est tout aussi américaine. Il crée des murs de vitraux qu’il nomme des « écrans de lumière » et maîtrise le porte-à-faux comme personne avant lui.
Tout au long de sa carrière, l’insistance de Frank Lloyd Wright à concevoir des résidences pratiques, admirables et dans lesquelles on peut s’épanouir résonne aujourd’hui profondément avec le défi architectural mondial de créer des demeures confortables, durables et économes en énergie.
Au Japon, on trouve aujourd’hui de puissants échos de la révolution résidentielle de Frank Lloyd Wright dans les maisons conçues par des architectes comme Kazuyo Sejima, Kengo Kuma et Takaharu Tezuka. Ils sont, eux aussi, salués pour une mise en œuvre harmonieuse qui tient compte du climat et de l’impact environnemental, pour leurs techniques innovantes de construction, leurs technologies et leur vision originale.
D’ailleurs, des architectes continuent, partout au Japon, d’être inspirés par les idéaux qu’incarne le travail de l’architecte américain. « Wright a toujours pensé à la nature d’une manière pratique et non pas de façon abstraite », précise Kengo Kuma. « Quand il utilise des matériaux naturels, ils prennent soudain vie. Sa vision est brillamment prémonitoire. Aujourd’hui plus que jamais, après l’arrivée des “machines à habiter” de Le Corbusier qui nous ont opprimées, l’étude des bâtiments de Wright est une excellente occasion pour nous d’apprendre de quoi est faite la réalité. »
Takaharu Tezuka évoque l’obsession de Frank Lloyd Wright pour le confort : « Les résidents des maisons conçues par Wright n’ont jamais eu à vivre dans des espaces froids à l’atmosphère rationnelle. Quand il crée des espaces confortables, ils deviennent naturellement durables. Nous avons encore beaucoup à apprendre de lui. »
La rencontre de l’Orient et de l’Occident dans le quartier d’Asakusa, à Tokyo. Photo reproduite avec l’autorisation du Musée d’Edo-Tokyo
Le regard de Frank Lloyd Wright sur le Japon
En 1905, lorsque l’architecte visite le Japon pour la première fois, l’idée que se faisait l’Occident de l’exotisme japonais avait disparu. De grands pans des constructions féodales s’étaient envolés. Lorsque la période d’isolement prend fin après près de 300 ans, avec la restauration de Meiji, en 1868, le pays investit dans l’éducation, et donc « s’ouvre » et s’occidentalise.
Bien que Frank Lloyd Wright ait plus tard critiqué les bâtiments européens (« ce sont de mauvaises reproductions de mauvais originaux réalisées avec de mauvaises techniques »), il continue à penser que le Japon est l’endroit « le plus beau et le plus romantique » au monde. Quand les scandales de sa vie personnelle affectent sa carrière au début des années 1910, il se jette à corps perdu dans la construction du nouvel Hôtel impérial de Tokyo, qu’on lui a commandé.
Le regard de Frank Lloyd Wright sur le Japon
En 1905, lorsque l’architecte visite le Japon pour la première fois, l’idée que se faisait l’Occident de l’exotisme japonais avait disparu. De grands pans des constructions féodales s’étaient envolés. Lorsque la période d’isolement prend fin après près de 300 ans, avec la restauration de Meiji, en 1868, le pays investit dans l’éducation, et donc « s’ouvre » et s’occidentalise.
Bien que Frank Lloyd Wright ait plus tard critiqué les bâtiments européens (« ce sont de mauvaises reproductions de mauvais originaux réalisées avec de mauvaises techniques »), il continue à penser que le Japon est l’endroit « le plus beau et le plus romantique » au monde. Quand les scandales de sa vie personnelle affectent sa carrière au début des années 1910, il se jette à corps perdu dans la construction du nouvel Hôtel impérial de Tokyo, qu’on lui a commandé.
Frank Lloyd Wright (rangée du bas, troisième en partant de la droite) et l’équipe de l’Hôtel impérial, 1921. Photo reproduite avec l’autorisation de la Frank Lloyd Wright Foundation, le Museum of Modern Art/Avery Architectural & Fine Arts Library de l’université Columbia
Une première génération d’apprentis
Une douzaine de jeunes hommes environ ont étroitement secondé Frank Lloyd Wright, à son cabinet, dans la construction de l’Hôtel impérial de 1917 à 1922. De cette première « génération » d’apprentis, quatre ont connu de brillantes carrières et doivent beaucoup à l’influence directe du maître : Antonin Raymond (à l’extrême gauche sur la photo), Arata Endo (à droite de Raymond, habillé en blanc), Kameki Tsuchiura (assis au centre, en costume clair ; le directeur des travaux Paul Mueller est à sa gauche, et Wright à sa droite) et Yoshiya Tanoue. Ces hommes ont non seulement créé leurs propres chefs-d’œuvre et modifié le paysage urbain du Japon, mais ils ont aussi été des mentors pour toute une génération d’architectes, qui à son tour a influencé la génération suivante et ainsi de suite.
Frank Lloyd Wright et ces quatre « générations » d’architectes qui ont marché dans ses pas représentent tous ensemble une véritable convergence des mondes : le meilleur de la tradition et de la modernité du Japon et de l’Occident. Si on retrace leurs parcours de manière chronologique, l’influence de Wright, directe ou indirecte, est un fil rouge qui forme un continuum architectural évident.
Une première génération d’apprentis
Une douzaine de jeunes hommes environ ont étroitement secondé Frank Lloyd Wright, à son cabinet, dans la construction de l’Hôtel impérial de 1917 à 1922. De cette première « génération » d’apprentis, quatre ont connu de brillantes carrières et doivent beaucoup à l’influence directe du maître : Antonin Raymond (à l’extrême gauche sur la photo), Arata Endo (à droite de Raymond, habillé en blanc), Kameki Tsuchiura (assis au centre, en costume clair ; le directeur des travaux Paul Mueller est à sa gauche, et Wright à sa droite) et Yoshiya Tanoue. Ces hommes ont non seulement créé leurs propres chefs-d’œuvre et modifié le paysage urbain du Japon, mais ils ont aussi été des mentors pour toute une génération d’architectes, qui à son tour a influencé la génération suivante et ainsi de suite.
Frank Lloyd Wright et ces quatre « générations » d’architectes qui ont marché dans ses pas représentent tous ensemble une véritable convergence des mondes : le meilleur de la tradition et de la modernité du Japon et de l’Occident. Si on retrace leurs parcours de manière chronologique, l’influence de Wright, directe ou indirecte, est un fil rouge qui forme un continuum architectural évident.
1. Frank Lloyd Wright et Arata Endo
En janvier 1917, Frank Lloyd Wright est de retour à Tokyo où il passe beaucoup de temps alors que le projet de l’Hôtel impérial prend forme. Au cours des six années suivantes, grandement aidé par son bras droit, Arata Endo, il concevra treize autres bâtiments au Japon, dont six résidences privées. Arata Endo est diplômé de ce qui est aujourd’hui l’Université de Tokyo et a trié sur le volet plusieurs des dessinateurs de l’Hôtel impérial. De 1917 à 1918, il séjourne au Studio Taliesin de Wright, dans le Wisconsin, où il travaille sur les plans de l’Hôtel et sur d’autres projets. Plus tard, il supervisera l’achèvement de l’Hôtel impérial et de l’école Jiyu Gakuen – projet pour lequel il est crédité comme l’un des concepteurs – alors que Wright retourne aux États-Unis en 1922.
Des six projets résidentiels de Frank Lloyd Wright au Japon, trois seulement seront réalisés : les résidences Aisaku Hayashi, Arinobu Fukuhara et Tazaemon Yamamura. La résidence Fukuhara a été détruite par le grand tremblement de terre du Kanto en 1923.
La résidence Hayashi de Frank Lloyd Wright
Le premier projet résidentiel de Wright à l’extérieur de l’Amérique du Nord est la demeure conçue en 1917 pour le gérant de l’Hôtel impérial, Aisaku Hayashi et sa grande famille. Aisaku Hayashi a fréquenté l’école secondaire et a travaillé aux États-Unis pendant de nombreuses années, le mode de vie occidental lui était devenu naturel.
Nichée sur les contreforts d’une banlieue de Tokyo, la construction en bois de plain-pied a un style Prairie tardif. Toutefois, son toit de cuivre comporte des traverses en bois qui rappellent les décors katsuogi des sanctuaires shintoïstes traditionnels. À l’arrière, une vaste salle de séjour s’étire jusqu’à la piscine. La pièce est dominée par une cheminée en pierres d’oya laissées à l’état brut. C’est cette même pierre que Wright utilise pour les accents géométriques dans tout l’Hôtel impérial.
Aisaku Hayashi vend la résidence en 1923. Elle passe entre les mains de plusieurs propriétaires avant qu’une agence de publicité n’en fasse l’acquisition en 1950 pour l’utiliser comme maison d’hôtes. La demeure a été rénovée à plusieurs reprises au fil des ans et seuls le salon et la piscine sont demeurés presque intacts. Le bâtiment n’est pas ouvert au public.
En janvier 1917, Frank Lloyd Wright est de retour à Tokyo où il passe beaucoup de temps alors que le projet de l’Hôtel impérial prend forme. Au cours des six années suivantes, grandement aidé par son bras droit, Arata Endo, il concevra treize autres bâtiments au Japon, dont six résidences privées. Arata Endo est diplômé de ce qui est aujourd’hui l’Université de Tokyo et a trié sur le volet plusieurs des dessinateurs de l’Hôtel impérial. De 1917 à 1918, il séjourne au Studio Taliesin de Wright, dans le Wisconsin, où il travaille sur les plans de l’Hôtel et sur d’autres projets. Plus tard, il supervisera l’achèvement de l’Hôtel impérial et de l’école Jiyu Gakuen – projet pour lequel il est crédité comme l’un des concepteurs – alors que Wright retourne aux États-Unis en 1922.
Des six projets résidentiels de Frank Lloyd Wright au Japon, trois seulement seront réalisés : les résidences Aisaku Hayashi, Arinobu Fukuhara et Tazaemon Yamamura. La résidence Fukuhara a été détruite par le grand tremblement de terre du Kanto en 1923.
La résidence Hayashi de Frank Lloyd Wright
Le premier projet résidentiel de Wright à l’extérieur de l’Amérique du Nord est la demeure conçue en 1917 pour le gérant de l’Hôtel impérial, Aisaku Hayashi et sa grande famille. Aisaku Hayashi a fréquenté l’école secondaire et a travaillé aux États-Unis pendant de nombreuses années, le mode de vie occidental lui était devenu naturel.
Nichée sur les contreforts d’une banlieue de Tokyo, la construction en bois de plain-pied a un style Prairie tardif. Toutefois, son toit de cuivre comporte des traverses en bois qui rappellent les décors katsuogi des sanctuaires shintoïstes traditionnels. À l’arrière, une vaste salle de séjour s’étire jusqu’à la piscine. La pièce est dominée par une cheminée en pierres d’oya laissées à l’état brut. C’est cette même pierre que Wright utilise pour les accents géométriques dans tout l’Hôtel impérial.
Aisaku Hayashi vend la résidence en 1923. Elle passe entre les mains de plusieurs propriétaires avant qu’une agence de publicité n’en fasse l’acquisition en 1950 pour l’utiliser comme maison d’hôtes. La demeure a été rénovée à plusieurs reprises au fil des ans et seuls le salon et la piscine sont demeurés presque intacts. Le bâtiment n’est pas ouvert au public.
Perspective de la résidence de Tadashiro Inoue, 1918. Maquette réalisée à l’Université Nihon. Photo reproduite avec l’autorisation de la Frank Lloyd Wright Foundation
La résidence Inoue de Frank Lloyd Wright
Le vicomte Tadashiro Inoue a vécu en Allemagne et aux États-Unis à la fin du XIXᵉ siècle. Il connaît la renommée de Wright et lui passe la commande d’une résidence sur la colline de Mejiro, à Tokyo. En 1918, Frank Lloyd Wright dessine les plans de cette élégante demeure de deux étages dans le style fin de Prairie. Faite de brique, de pierre d’oya et de béton armé, elle devait comprendre une aile d’un étage au nord-est, une pièce de tatamis à l’ouest, un garage pour trois voitures et les quartiers des chauffeurs. La villa ne sera jamais construite, probablement en raison du coût anticipé de son entretien.
La résidence Inoue de Frank Lloyd Wright
Le vicomte Tadashiro Inoue a vécu en Allemagne et aux États-Unis à la fin du XIXᵉ siècle. Il connaît la renommée de Wright et lui passe la commande d’une résidence sur la colline de Mejiro, à Tokyo. En 1918, Frank Lloyd Wright dessine les plans de cette élégante demeure de deux étages dans le style fin de Prairie. Faite de brique, de pierre d’oya et de béton armé, elle devait comprendre une aile d’un étage au nord-est, une pièce de tatamis à l’ouest, un garage pour trois voitures et les quartiers des chauffeurs. La villa ne sera jamais construite, probablement en raison du coût anticipé de son entretien.
Élévation de la résidence de Shimpei Goto, 1921. Maquette réalisée à l’Université Nihon. Photo reproduite avec l’autorisation de la Frank Lloyd Wright Foundation
La résidence Goto de Frank Lloyd Wright
Frank Lloyd Wright a également réalisé les croquis préliminaires de cette résidence de deux étages pour le baron Shimpei Goto, directeur de la Japan National Railway et gouverneur de Tokyo en 1921. Elle ne sera jamais construite, mais les croquis et cette maquette récente démontrent une remarquable adaptation du style Prairie appliqué à un bâtiment officiel : une conception formelle et une échelle propre à un édifice gouvernemental. Il devait y avoir une grande salle de réception au rez-de-chaussée, encadrée d’une loggia ouverte sur un jardin et des quartiers privés au deuxième étage.
La résidence Goto de Frank Lloyd Wright
Frank Lloyd Wright a également réalisé les croquis préliminaires de cette résidence de deux étages pour le baron Shimpei Goto, directeur de la Japan National Railway et gouverneur de Tokyo en 1921. Elle ne sera jamais construite, mais les croquis et cette maquette récente démontrent une remarquable adaptation du style Prairie appliqué à un bâtiment officiel : une conception formelle et une échelle propre à un édifice gouvernemental. Il devait y avoir une grande salle de réception au rez-de-chaussée, encadrée d’une loggia ouverte sur un jardin et des quartiers privés au deuxième étage.
Photo reproduite avec l’autorisation de la Yodoko Steel Works
La résidence Yamamura de Frank Lloyd Wright et d’Arata Endo
Cette villa d’été, réalisée pour un riche brasseur de saké, Tazaemon Yamamura, ne fut achevée que six ans après que l’architecte en eut fait les dessins conceptuels et une maquette en 1918. La raison : des retards dans la construction de l’Hôtel impérial. Arata Endo s’est chargé de la réalisation de la villa après le départ de Frank Lloyd Wright du Japon en 1922. Quand elle fut achevée en 1924, il en partagea le mérite avec Frank Lloyd Wright pour la deuxième fois, la première remontant à leur collaboration en 1921 pour l’école Jiyu Gakuen.
La résidence Yamamura de Frank Lloyd Wright et d’Arata Endo
Cette villa d’été, réalisée pour un riche brasseur de saké, Tazaemon Yamamura, ne fut achevée que six ans après que l’architecte en eut fait les dessins conceptuels et une maquette en 1918. La raison : des retards dans la construction de l’Hôtel impérial. Arata Endo s’est chargé de la réalisation de la villa après le départ de Frank Lloyd Wright du Japon en 1922. Quand elle fut achevée en 1924, il en partagea le mérite avec Frank Lloyd Wright pour la deuxième fois, la première remontant à leur collaboration en 1921 pour l’école Jiyu Gakuen.
Photo reproduite avec l’autorisation de la Yodoko Steel Works
La villa est située sur le haut d’une colline à Ashiya. Elle surplombe la baie d’Osaka dans l’ouest du Japon. La construction prouve le génie de Wright pour la composition spatiale : elle dispose de quatre niveaux, mais aucun n’a plus de deux étages. « Cette maison est escheresque », dit en riant le spécialiste Alex Kerr. Il lui arrivait de se faufiler à l’intérieur lorsqu’elle fut abandonnée pendant un temps dans les années 1970. « On montait quelques marches et on se retrouvait plus bas qu’au départ », raconte-t-il.
La villa est située sur le haut d’une colline à Ashiya. Elle surplombe la baie d’Osaka dans l’ouest du Japon. La construction prouve le génie de Wright pour la composition spatiale : elle dispose de quatre niveaux, mais aucun n’a plus de deux étages. « Cette maison est escheresque », dit en riant le spécialiste Alex Kerr. Il lui arrivait de se faufiler à l’intérieur lorsqu’elle fut abandonnée pendant un temps dans les années 1970. « On montait quelques marches et on se retrouvait plus bas qu’au départ », raconte-t-il.
Photo reproduite avec l’autorisation de la Yodoko Steel Works
Wright a choisi de construire la maison à flanc de colline afin de profiter de la vue alentour et de la brise rafraîchissante. L’extérieur rappelle la résidence Aline Barnsdall, à Los Angeles, que Wright a conçue en même temps. Ici, les blocs décoratifs sont faits de pierres d’oya et non pas de béton.
Arata Endo étoffa les croquis de Frank Lloyd Wright au moment où la conception finale prend forme. Il ajouta trois pièces de tatamis ornées de panneaux coulissants fusuma, créa un shakkei, ou « vue empruntée », dans le salon à l’étage et l’encadra d’une fenêtre comme si c’était un tableau.
Un couloir longe les pièces de tatamis au deuxième étage et dispose d’une longue enfilade de portes à battants. Chacune présente les motifs variés de bois et de cuivre patinés qu’on trouve ailleurs dans la maison. Il s’y déploie, tout au long de la journée, une symphonie d’effets visuels lorsque le soleil se déplace sur toute la longueur de la façade ouest.
Wright a choisi de construire la maison à flanc de colline afin de profiter de la vue alentour et de la brise rafraîchissante. L’extérieur rappelle la résidence Aline Barnsdall, à Los Angeles, que Wright a conçue en même temps. Ici, les blocs décoratifs sont faits de pierres d’oya et non pas de béton.
Arata Endo étoffa les croquis de Frank Lloyd Wright au moment où la conception finale prend forme. Il ajouta trois pièces de tatamis ornées de panneaux coulissants fusuma, créa un shakkei, ou « vue empruntée », dans le salon à l’étage et l’encadra d’une fenêtre comme si c’était un tableau.
Un couloir longe les pièces de tatamis au deuxième étage et dispose d’une longue enfilade de portes à battants. Chacune présente les motifs variés de bois et de cuivre patinés qu’on trouve ailleurs dans la maison. Il s’y déploie, tout au long de la journée, une symphonie d’effets visuels lorsque le soleil se déplace sur toute la longueur de la façade ouest.
Photo reproduite avec l’autorisation de la Yodoko Steel Works
La demeure Yamamura témoigne de la première véritable synthèse entre l’architecture japonaise et occidentale. « Je pense que la contribution d’Arata Endo à l’architecture japonaise est aussi riche que celle de Wright », explique Margo Stipe, historienne de l’architecture et secrétaire générale de la Frank Lloyd Wright Foundation. « Il croyait vraiment en ce que Wright faisait. Il s’identifiait autant à l’architecture traditionnelle japonaise qu’à celle de Wright et pensait que les deux pourraient se fondre et enrichir cette tradition d’une architecture organique. »
Yodogawa Steel Works a acquis la résidence en 1947. Il est le premier bâtiment de l’ère Taisho à avoir obtenu le label du patrimoine culturel en 1974. La maison d’hôte Yodoko est ouverte au public certains jours, selon un calendrier précis.
La demeure Yamamura témoigne de la première véritable synthèse entre l’architecture japonaise et occidentale. « Je pense que la contribution d’Arata Endo à l’architecture japonaise est aussi riche que celle de Wright », explique Margo Stipe, historienne de l’architecture et secrétaire générale de la Frank Lloyd Wright Foundation. « Il croyait vraiment en ce que Wright faisait. Il s’identifiait autant à l’architecture traditionnelle japonaise qu’à celle de Wright et pensait que les deux pourraient se fondre et enrichir cette tradition d’une architecture organique. »
Yodogawa Steel Works a acquis la résidence en 1947. Il est le premier bâtiment de l’ère Taisho à avoir obtenu le label du patrimoine culturel en 1974. La maison d’hôte Yodoko est ouverte au public certains jours, selon un calendrier précis.
Photo de Wasaku Kuno
La demeure Kondo d’Arata Endo
C’est par l’entremise des milieux ecclésiastiques qu’Arata Endo rencontre Kenji Kondo, alors à la tête de l’Asahi Asbestos Co et ancien secrétaire du baron Shimpei Goto à Taiwan. Il est le père de onze enfants. Kenji Kondo possède une énorme parcelle de terrain à Tsujido dans la préfecture de Kanagawa, pour laquelle il demande à Endo de concevoir une maison de week-end. Il s’inspire de Frank Lloyd Wright pour créer une construction en forme de L attenante à un grand étang à l’extrémité nord du site qui offre un harmonieux ancrage à la maison. Tout comme Frank Lloyd Wright, Endo conçoit tous les meubles et les luminaires afin d’assurer une parfaite cohérence.
La demeure Kondo d’Arata Endo
C’est par l’entremise des milieux ecclésiastiques qu’Arata Endo rencontre Kenji Kondo, alors à la tête de l’Asahi Asbestos Co et ancien secrétaire du baron Shimpei Goto à Taiwan. Il est le père de onze enfants. Kenji Kondo possède une énorme parcelle de terrain à Tsujido dans la préfecture de Kanagawa, pour laquelle il demande à Endo de concevoir une maison de week-end. Il s’inspire de Frank Lloyd Wright pour créer une construction en forme de L attenante à un grand étang à l’extrémité nord du site qui offre un harmonieux ancrage à la maison. Tout comme Frank Lloyd Wright, Endo conçoit tous les meubles et les luminaires afin d’assurer une parfaite cohérence.
Photo de Wasaku Kuno
L’étage de la maison dispose d’un bureau avec des écrans shoji et des tatamis. Au rez-de-chaussée se trouvent trois pièces de tatamis et un salon-salle à manger de style occidental disposé autour d’une immense cheminée en pierre d’oya, qui ressemble aux nombreux aménagements réalisés par Endo et Wright pour l’Hôtel impérial, l’école Jiyu Gakuen et la résidence Yamamura. La maison, construite en 1925, est faite de poutres de bois sur lesquelles repose un toit en croupe recouvert de chaume. À l’arrière se trouve une terrasse recouverte de glycines.
La villa a été miraculeusement sauvée de la démolition et, en 1983, déménagée et reconstruite tout à côté de la maison du citoyen à Fujisawa. La demeure est ouverte au public.
L’étage de la maison dispose d’un bureau avec des écrans shoji et des tatamis. Au rez-de-chaussée se trouvent trois pièces de tatamis et un salon-salle à manger de style occidental disposé autour d’une immense cheminée en pierre d’oya, qui ressemble aux nombreux aménagements réalisés par Endo et Wright pour l’Hôtel impérial, l’école Jiyu Gakuen et la résidence Yamamura. La maison, construite en 1925, est faite de poutres de bois sur lesquelles repose un toit en croupe recouvert de chaume. À l’arrière se trouve une terrasse recouverte de glycines.
La villa a été miraculeusement sauvée de la démolition et, en 1983, déménagée et reconstruite tout à côté de la maison du citoyen à Fujisawa. La demeure est ouverte au public.
La villa Kachi d’Arata Endo
Pour Toshio Kachi, un importateur exportateur qui rentrait au pays après de nombreuses années passées à Londres, Arata Endo a construit à la fois une maison de luxe à Tokyo et une spacieuse villa de vacances près du bord de mer à Hayama, dans la préfecture de Kanagawa. La villa, achevée en 1928, est faite de bois, de plâtre et de pierre d’oya. Elle dispose d’un toit de cuivre en pignon. Un balcon en dents de scie rappelle ceux de Frank Lloyd Wright au Studio Taliesin. Il s’étend jusqu’à l’étage où une « chambre avec vue » surplombe la baie de Sagami.
Pour Toshio Kachi, un importateur exportateur qui rentrait au pays après de nombreuses années passées à Londres, Arata Endo a construit à la fois une maison de luxe à Tokyo et une spacieuse villa de vacances près du bord de mer à Hayama, dans la préfecture de Kanagawa. La villa, achevée en 1928, est faite de bois, de plâtre et de pierre d’oya. Elle dispose d’un toit de cuivre en pignon. Un balcon en dents de scie rappelle ceux de Frank Lloyd Wright au Studio Taliesin. Il s’étend jusqu’à l’étage où une « chambre avec vue » surplombe la baie de Sagami.
Ici, une photo d’époque de l’intérieur de la villa Kachi. Photo reproduite avec l’autorisation de Kiyoshi Higuchi
Située sur le flanc d’une colline escarpée, les volumes de la maison s’emboîtent les uns dans les autres de manière complexe et époustouflante, semblables à ceux de la résidence Yamamura. De l’entrée, on accède au salon du rez-de-chaussée avec sa cheminée d’oya sculpté, puis on passe à la cuisine et à la salle à manger. On rejoint la salle de billard par une autre volée de marches où se trouve encore une cheminée d’oya ainsi qu’une des caractéristiques préférées de Frank Lloyd Wright : un cantou. Au niveau de la mezzanine, des galeries aux parois percées de losanges donnent sur chaque extrémité du salon et remontent jusqu’à dépasser l’étage des chambres à coucher.
Amoureusement entretenue par la famille Kachi depuis plusieurs générations, la résidence est maintenant gérée par le Heritage Houses Trust, qui ouvre les portes de la villa au public à l’occasion.
Située sur le flanc d’une colline escarpée, les volumes de la maison s’emboîtent les uns dans les autres de manière complexe et époustouflante, semblables à ceux de la résidence Yamamura. De l’entrée, on accède au salon du rez-de-chaussée avec sa cheminée d’oya sculpté, puis on passe à la cuisine et à la salle à manger. On rejoint la salle de billard par une autre volée de marches où se trouve encore une cheminée d’oya ainsi qu’une des caractéristiques préférées de Frank Lloyd Wright : un cantou. Au niveau de la mezzanine, des galeries aux parois percées de losanges donnent sur chaque extrémité du salon et remontent jusqu’à dépasser l’étage des chambres à coucher.
Amoureusement entretenue par la famille Kachi depuis plusieurs générations, la résidence est maintenant gérée par le Heritage Houses Trust, qui ouvre les portes de la villa au public à l’occasion.
2. Antonin Raymond : un moderniste de la mouvance Est-Ouest
Tchèque de naissance et naturalisé américain, Antonin Raymond est un autre apprenti de la première génération de Frank Lloyd Wright au Japon. Avec son épouse Noémi Pernessin, une artiste d’origine française, ils réalisent d’abord leur rêve de travailler avec Frank Lloyd Wright en 1916 à Taliesin, où Antonin Raymond réalise des dessins pour un modèle de système de construction de maisons économique : un prototype qui annonce les maisons « usoniennes » de Frank Lloyd Wright. Il travaille aussi à des perspectives de l’Hôtel impérial. Le couple apprend alors à apprécier l’esthétique japonaise de l’épure et de la relation intime entre l’homme et la nature que cultive Wright. Lorsque ce dernier les invite à collaborer à la construction de l’Hôtel impérial en 1919, ils acceptent immédiatement.
Le couple ne participe au projet que pendant un an mais ils passeront près de quarante ans au Japon et réaliseront plus de 400 créations. Comme Frank Lloyd Wright, ils conçoivent du mobilier et des luminaires. Ils élaborent leur propre concept des principes de l’architecture organique : un bâtiment doit être simple, intègre, franc, économique et naturel. Lorsque Antonin Raymond quitte le giron de Frank Lloyd Wright, il expérimente l’utilisation du béton armé coulé sur place. Il en arrive à une maîtrise tellement précise qu’elle rappelle les constructions de bois traditionnelles japonaises.
Il devient vite la courroie de transmission des dernières tendances en architecture occidentale lorsqu’il embauche des architectes locaux à peine rentrés de l’étranger. Avec des disciples comme Junzo Yoshimura et Kunio Maekawa – qui a travaillé avec Le Corbusier à Paris pendant deux ans –, Antonin Raymond suit les traces de son mentor en sensibilisant les architectes japonais aux richesses de leurs propres traditions. Au début des années 1930, lui et son équipe développent un modernisme de la mouvance Est-Ouest unique au Japon.
La villa de l’ambassade d’Italie d’Antonin Raymond
La villa de l’ambassade d’Italie est située sur les rives du lac Chuzenji, à Nikko, un lieu de villégiature populaire. Construite en 1929, elle est la seconde habitation en bois d’Antonin Raymond. Alors qu’il se familiarise avec le langage architectural vernaculaire traditionnel japonais, on le voit travailler pour une fois avec des matériaux locaux. Antonin Raymond choisit l’écorce de cèdre pour le revêtement extérieur et l’utilise aussi à l’intérieur sur les plafonds et les murs dans le style Ajiro qui apparaît souvent dans les salons de thé de chashitsu. Il crée ainsi une mosaïque éblouissante de motifs différents et ancre le bâtiment dans son environnement naturel. Le salon dispose d’une cheminée en pierre rustique. Le porche, où l’on peut s’asseoir toute l’année sauf l’hiver, s’élève sur le bord du lac et offre une vue imprenable sur l’eau et les montagnes.
Tchèque de naissance et naturalisé américain, Antonin Raymond est un autre apprenti de la première génération de Frank Lloyd Wright au Japon. Avec son épouse Noémi Pernessin, une artiste d’origine française, ils réalisent d’abord leur rêve de travailler avec Frank Lloyd Wright en 1916 à Taliesin, où Antonin Raymond réalise des dessins pour un modèle de système de construction de maisons économique : un prototype qui annonce les maisons « usoniennes » de Frank Lloyd Wright. Il travaille aussi à des perspectives de l’Hôtel impérial. Le couple apprend alors à apprécier l’esthétique japonaise de l’épure et de la relation intime entre l’homme et la nature que cultive Wright. Lorsque ce dernier les invite à collaborer à la construction de l’Hôtel impérial en 1919, ils acceptent immédiatement.
Le couple ne participe au projet que pendant un an mais ils passeront près de quarante ans au Japon et réaliseront plus de 400 créations. Comme Frank Lloyd Wright, ils conçoivent du mobilier et des luminaires. Ils élaborent leur propre concept des principes de l’architecture organique : un bâtiment doit être simple, intègre, franc, économique et naturel. Lorsque Antonin Raymond quitte le giron de Frank Lloyd Wright, il expérimente l’utilisation du béton armé coulé sur place. Il en arrive à une maîtrise tellement précise qu’elle rappelle les constructions de bois traditionnelles japonaises.
Il devient vite la courroie de transmission des dernières tendances en architecture occidentale lorsqu’il embauche des architectes locaux à peine rentrés de l’étranger. Avec des disciples comme Junzo Yoshimura et Kunio Maekawa – qui a travaillé avec Le Corbusier à Paris pendant deux ans –, Antonin Raymond suit les traces de son mentor en sensibilisant les architectes japonais aux richesses de leurs propres traditions. Au début des années 1930, lui et son équipe développent un modernisme de la mouvance Est-Ouest unique au Japon.
La villa de l’ambassade d’Italie d’Antonin Raymond
La villa de l’ambassade d’Italie est située sur les rives du lac Chuzenji, à Nikko, un lieu de villégiature populaire. Construite en 1929, elle est la seconde habitation en bois d’Antonin Raymond. Alors qu’il se familiarise avec le langage architectural vernaculaire traditionnel japonais, on le voit travailler pour une fois avec des matériaux locaux. Antonin Raymond choisit l’écorce de cèdre pour le revêtement extérieur et l’utilise aussi à l’intérieur sur les plafonds et les murs dans le style Ajiro qui apparaît souvent dans les salons de thé de chashitsu. Il crée ainsi une mosaïque éblouissante de motifs différents et ancre le bâtiment dans son environnement naturel. Le salon dispose d’une cheminée en pierre rustique. Le porche, où l’on peut s’asseoir toute l’année sauf l’hiver, s’élève sur le bord du lac et offre une vue imprenable sur l’eau et les montagnes.
Photo reproduite avec l’autorisation du musée des Sciences naturelles de Nikko
Le lac Chuzenji est plus tard abandonné par le corps diplomatique et, en 1997, la propriété est transférée à la préfecture de Tochigi. S’entreprend alors une restauration qui durera deux ans. Le bâtiment est aujourd’hui ouvert au public.
Le lac Chuzenji est plus tard abandonné par le corps diplomatique et, en 1997, la propriété est transférée à la préfecture de Tochigi. S’entreprend alors une restauration qui durera deux ans. Le bâtiment est aujourd’hui ouvert au public.
Photo reproduite avec l’autorisation de Koichi Kitazawa
La maison d’été d’Antonin Raymond
En 1933, Raymond réalise une fusion mémorable et poétique de l’Orient et de l’Occident, s’inspirant de Le Corbusier et de son projet jamais construit, la résidence Errázuriz, afin de créer un atelier d’été à Karuizawa. Érigée sur des fondations de béton, la construction de bois est surmontée d’un toit de chaume de mélèze. Le plan en forme de T n’est pas entravé de murs porteurs. Des hikido coulissants permettent une circulation constante entre l’intérieur et l’extérieur. Malheureusement, la maison d’été a été déplacée et substantiellement modifiée. Le bâtiment abrite aujourd’hui le musée Peynet et est ouvert au public.
La maison d’été d’Antonin Raymond
En 1933, Raymond réalise une fusion mémorable et poétique de l’Orient et de l’Occident, s’inspirant de Le Corbusier et de son projet jamais construit, la résidence Errázuriz, afin de créer un atelier d’été à Karuizawa. Érigée sur des fondations de béton, la construction de bois est surmontée d’un toit de chaume de mélèze. Le plan en forme de T n’est pas entravé de murs porteurs. Des hikido coulissants permettent une circulation constante entre l’intérieur et l’extérieur. Malheureusement, la maison d’été a été déplacée et substantiellement modifiée. Le bâtiment abrite aujourd’hui le musée Peynet et est ouvert au public.
Photo de Wasaku Kuno
3. Kameki Tsuchiura, pionnier de la standardisation
Un autre apprenti de la première génération, Kameki Tsuchiura, commence à travailler avec Frank Lloyd Wright sur le projet de l’Hôtel impérial en 1921 alors qu’il est encore étudiant. Lorsque Wright quitte le Japon l’année suivante, Tsuchiura et son épouse, Nobu, le suivent rapidement. Ils restent auprès de lui pendant deux ans, à Los Angeles et à Taliesin. Ils complètent les dessins pour les maisons construites à l’aide du procédé « textile block » (Storer, Freeman, Ennis) ainsi que sur d’autres projets. Ils se lient d’amitié avec les apprentis R.M. Schindler, Werner Moser et Richard Neutra.
Après son retour au Japon en 1926, Kameki Tsuchiura continue à travailler dans le style de Frank Lloyd Wright, mais axé sur l’amélioration des conditions de logement. Il adopte lentement le style international, alors en plein essor, pour ses aspects fonctionnels, rationnels et économiques. Prenant exemple sur les maisons « textile block » et dans un but de standardisation et d’efficacité, il remplace les blocs par des panneaux de gypse fixés à des cadres de bois.
La résidence Tsuchiura de Kameki Tsuchiura
En 1935, Kameki Tsuchiura construit ce qui allait devenir l’une de ses plus célèbres résidences : sa propre maison, dans l’ouest de Tokyo. Les espaces verticaux qui s’emboîtent à l’intérieur, le salon à double hauteur et son interaction avec le jardin doivent beaucoup à Frank Lloyd Wright. Elle est néanmoins une « boîte blanche » résolument moderniste – avec des touches ludiques de couleur un peu partout. Kameki Tsuchiura choisit un toit plat plutôt que le toit en croupe traditionnel, pourtant mieux adapté au climat humide du Japon. C’est pour lui un moyen de rompre avec l’ancien et d’inaugurer le nouveau.
3. Kameki Tsuchiura, pionnier de la standardisation
Un autre apprenti de la première génération, Kameki Tsuchiura, commence à travailler avec Frank Lloyd Wright sur le projet de l’Hôtel impérial en 1921 alors qu’il est encore étudiant. Lorsque Wright quitte le Japon l’année suivante, Tsuchiura et son épouse, Nobu, le suivent rapidement. Ils restent auprès de lui pendant deux ans, à Los Angeles et à Taliesin. Ils complètent les dessins pour les maisons construites à l’aide du procédé « textile block » (Storer, Freeman, Ennis) ainsi que sur d’autres projets. Ils se lient d’amitié avec les apprentis R.M. Schindler, Werner Moser et Richard Neutra.
Après son retour au Japon en 1926, Kameki Tsuchiura continue à travailler dans le style de Frank Lloyd Wright, mais axé sur l’amélioration des conditions de logement. Il adopte lentement le style international, alors en plein essor, pour ses aspects fonctionnels, rationnels et économiques. Prenant exemple sur les maisons « textile block » et dans un but de standardisation et d’efficacité, il remplace les blocs par des panneaux de gypse fixés à des cadres de bois.
La résidence Tsuchiura de Kameki Tsuchiura
En 1935, Kameki Tsuchiura construit ce qui allait devenir l’une de ses plus célèbres résidences : sa propre maison, dans l’ouest de Tokyo. Les espaces verticaux qui s’emboîtent à l’intérieur, le salon à double hauteur et son interaction avec le jardin doivent beaucoup à Frank Lloyd Wright. Elle est néanmoins une « boîte blanche » résolument moderniste – avec des touches ludiques de couleur un peu partout. Kameki Tsuchiura choisit un toit plat plutôt que le toit en croupe traditionnel, pourtant mieux adapté au climat humide du Japon. C’est pour lui un moyen de rompre avec l’ancien et d’inaugurer le nouveau.
« J’ai visité la maison Tsuchiura une première fois quand j’avais environ 7 ans », se souvient l’architecte Fumihiko Maki, lauréat du prix Pritzker. « Je n’oublierai jamais l’instant où je suis entré et où j’ai fait l’expérience de cet espace. Il m’a laissé une impression indélébile. Son articulation unique de l’espace a été influencée par Frank Lloyd Wright. Mais je pense que ses matériaux et son langage peuvent être vus comme l’incarnation de la modernité. »
La carrière de Kameki Tsuchiura est couronnée par la renommée de ses bâtiments commerciaux, mais le « modernisme négocié » de ses créations résidentielles est lentement devenu son style dominant.
La carrière de Kameki Tsuchiura est couronnée par la renommée de ses bâtiments commerciaux, mais le « modernisme négocié » de ses créations résidentielles est lentement devenu son style dominant.
4. Yoshiya Tanoue, père du modernisme Hokkaido
Un autre disciple issu de la première génération des apprentis de Frank Lloyd Wright, Yoshiya Tanoue, continue à travailler sur l’Hôtel impérial après le départ du maître. Il est en compagnie d’Arata Endo lorsque le dévastateur tremblement de terre du Kanto frappe le jour de la grande ouverture de l’hôtel, en 1923. Yoshiya Tanoue décide de s’installer au nord, sur l’île d’Hokkaido. Frank Lloyd Wright lui écrit des mots d’encouragement : « Votre pays a besoin du travail de ses fils, ceux qui possèdent une conscience élevée de l’architecture. Si je suis parvenu à l’insuffler à certains d’entre vous, soyez assuré que je m’en estimerai heureux. La participation de tous est primordiale en ces temps éprouvants. »
Yoshiya Tanoue ouvre un cabinet d’architecture à Sapporo en 1924. Ses premières œuvres mettent en valeur l’influence de Frank Lloyd Wright dans la conception des toits, l’ornementation géométrique et les magnifiques fenêtres « écran de lumière ». Dans les années 1930, il élabore un style « pays de neige » avec la création de maisons qui tiennent compte du climat neigeux. 800 bâtiments plus tard, il est aujourd’hui considéré comme le père de l’architecture moderne d’Hokkaido.
La résidence Oguma de Yoshiya Tanoue
Située au pied du mont Moiwayama, à Sapporo, la demeure Oguma, richement décorée, a été construite par Tanoue en 1927. À cause de la voie ferrée qui passe au nord du terrain, l’architecte a aménagé la cuisine et les espaces utilitaires sur ce côté de la maison. La porte d’entrée s’ouvre immédiatement sur une grande pièce avec une fenêtre en vitrail à double hauteur. La construction de bois de deux étages et sa configuration cruciforme sont des classiques de Frank Lloyd Wright. Mais Yoshiya Tanoue s’affirme à travers ses luminaires géométriques, ses petites fenêtres et leurs décorations.
Un autre disciple issu de la première génération des apprentis de Frank Lloyd Wright, Yoshiya Tanoue, continue à travailler sur l’Hôtel impérial après le départ du maître. Il est en compagnie d’Arata Endo lorsque le dévastateur tremblement de terre du Kanto frappe le jour de la grande ouverture de l’hôtel, en 1923. Yoshiya Tanoue décide de s’installer au nord, sur l’île d’Hokkaido. Frank Lloyd Wright lui écrit des mots d’encouragement : « Votre pays a besoin du travail de ses fils, ceux qui possèdent une conscience élevée de l’architecture. Si je suis parvenu à l’insuffler à certains d’entre vous, soyez assuré que je m’en estimerai heureux. La participation de tous est primordiale en ces temps éprouvants. »
Yoshiya Tanoue ouvre un cabinet d’architecture à Sapporo en 1924. Ses premières œuvres mettent en valeur l’influence de Frank Lloyd Wright dans la conception des toits, l’ornementation géométrique et les magnifiques fenêtres « écran de lumière ». Dans les années 1930, il élabore un style « pays de neige » avec la création de maisons qui tiennent compte du climat neigeux. 800 bâtiments plus tard, il est aujourd’hui considéré comme le père de l’architecture moderne d’Hokkaido.
La résidence Oguma de Yoshiya Tanoue
Située au pied du mont Moiwayama, à Sapporo, la demeure Oguma, richement décorée, a été construite par Tanoue en 1927. À cause de la voie ferrée qui passe au nord du terrain, l’architecte a aménagé la cuisine et les espaces utilitaires sur ce côté de la maison. La porte d’entrée s’ouvre immédiatement sur une grande pièce avec une fenêtre en vitrail à double hauteur. La construction de bois de deux étages et sa configuration cruciforme sont des classiques de Frank Lloyd Wright. Mais Yoshiya Tanoue s’affirme à travers ses luminaires géométriques, ses petites fenêtres et leurs décorations.
Photo de Yukihiro Kato
Les espaces de vie sont orientés au sud afin de profiter de la chaleur du soleil pendant les longs hivers. À l’étage, un atelier d’artiste est ponctué de hautes fenêtres et d’imposantes poutres de bois : ce sont les premières tentatives de Yoshiya Tanoue pour une construction adaptée et locale.
Une chance exceptionnelle pour un bâtiment historique au Japon : la maison a été sauvegardée grâce à un mouvement populaire. Elle a été restaurée dans sa forme originale en 1998. Aujourd’hui, elle abrite le populaire café Lloyd’s.
Les espaces de vie sont orientés au sud afin de profiter de la chaleur du soleil pendant les longs hivers. À l’étage, un atelier d’artiste est ponctué de hautes fenêtres et d’imposantes poutres de bois : ce sont les premières tentatives de Yoshiya Tanoue pour une construction adaptée et locale.
Une chance exceptionnelle pour un bâtiment historique au Japon : la maison a été sauvegardée grâce à un mouvement populaire. Elle a été restaurée dans sa forme originale en 1998. Aujourd’hui, elle abrite le populaire café Lloyd’s.
Photo de Yukihiro Kato
La résidence Sada de Yoshiya Tanoue
La résidence Sada, située près de la baie d’Hakodate, au sud d’Hokkaido, a été construite pour un marchand de produits de la mer en 1928. Le bâtiment de deux étages en bois et en béton possède deux entrées : l’une sur la rue et une autre ouvrant sur un escalier qui mène à une chambre d’amis à l’étage. La structure en forme de L est orientée de façon à donner vue sur le nord de la baie et sur le jardin. Une salle de réception unique de forme octogonale filtre la lumière du soleil sur trois côtés grâce à des vitraux décoratifs. Le salon, de style occidental, dispose d’une énorme cheminée. Au rez-de-chaussée, il y a aussi trois pièces de tatamis aménagées traditionnellement avec des écrans shoji.
La résidence Sada de Yoshiya Tanoue
La résidence Sada, située près de la baie d’Hakodate, au sud d’Hokkaido, a été construite pour un marchand de produits de la mer en 1928. Le bâtiment de deux étages en bois et en béton possède deux entrées : l’une sur la rue et une autre ouvrant sur un escalier qui mène à une chambre d’amis à l’étage. La structure en forme de L est orientée de façon à donner vue sur le nord de la baie et sur le jardin. Une salle de réception unique de forme octogonale filtre la lumière du soleil sur trois côtés grâce à des vitraux décoratifs. Le salon, de style occidental, dispose d’une énorme cheminée. Au rez-de-chaussée, il y a aussi trois pièces de tatamis aménagées traditionnellement avec des écrans shoji.
Photo de Yukihiro Kato
L’ancienne résidence, classée au patrimoine, devient le café Hiyori et ouvre ses portes du printemps à l’automne.
Le point sur l’héritage de Frank Lloyd Wright au Japon se poursuit dans la deuxième partie de cette série, qui retrace l’influence marquante de Wright sur les architectes des générations qui l’ont suivi.
L’ancienne résidence, classée au patrimoine, devient le café Hiyori et ouvre ses portes du printemps à l’automne.
Le point sur l’héritage de Frank Lloyd Wright au Japon se poursuit dans la deuxième partie de cette série, qui retrace l’influence marquante de Wright sur les architectes des générations qui l’ont suivi.
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Je connaissais bien l'influence de l'architecture Japonaise sur le travail de FLWright mais pas vraiment l'inverse... article très intéressant, merci!