Archi : Le pari fou d'une famille de surélever son immeuble
Découvrez toutes les clés d'un projet rare : la surélévation de 54 m² d'un immeuble neuf à Paris XIIIe pour une famille
Les propriétaires habitaient depuis neuf ans dans un appartement neuf de 80 m², situé au dernier étage d’un immeuble construit en 2005, dans le XIIIᵉ arrondissement à Paris. Quand leur famille s’agrandit, le couple, avide de mètres carrés supplémentaires, étudie la possibilité de surélever son logement. Après avoir fait un appel d’offre sur Internet, il sélectionne l’architecte Florence Gaudin, férue d’agrandissement de maison, mais pour qui ce sera la première surélévation d’immeuble : « Un projet passionnant du début à la fin, avec un propriétaire très impliqué, dans lequel nous nous sommes investis pendant deux ans », affirme l’architecte qui revient pour nous sur les étapes clés de la réalisation.
Plan de l’existant
À l’origine l’appartement de 80 m², situé au sixième étage d’une résidence haut de gamme, comportait trois chambres, comme on le voit sur le plan de l’existant. Les propriétaires, nécessitant une quatrième chambre, estimaient que l’ajout d’un étage pourrait résoudre leur problème d’augmentation de surface habitable.
Ils avaient initialement pensé limiter cet étage à 20 m² pour se faciliter les démarches administratives et éviter le dépôt d’un permis de construire mais, rassuré par l’architecte, ils ont fait évoluer leur projet à la hausse, décidant de porter la surface de l’extension à 54 m².
À l’origine l’appartement de 80 m², situé au sixième étage d’une résidence haut de gamme, comportait trois chambres, comme on le voit sur le plan de l’existant. Les propriétaires, nécessitant une quatrième chambre, estimaient que l’ajout d’un étage pourrait résoudre leur problème d’augmentation de surface habitable.
Ils avaient initialement pensé limiter cet étage à 20 m² pour se faciliter les démarches administratives et éviter le dépôt d’un permis de construire mais, rassuré par l’architecte, ils ont fait évoluer leur projet à la hausse, décidant de porter la surface de l’extension à 54 m².
Le permis ne représentait en réalité qu’un obstacle minime, comme nous l’explique Florence Gaudin, l’architecte : « Nous avons mis un mois et demi à l’obtenir, ce qui est très peu, et avons été pleinement soutenus dans notre projet par l’architecte des Bâtiments de France, les architectes du cabinet Derbesse, qui avaient conçu l’immeuble, et même le maire de l’arrondissement. À Paris, la densification de l’habitat posant problème, les projets qui permettent de gagner des mètres carrés de façon douce et bien intégrée sont fortement encouragés. »
Nouvelle donne pour la surélévation des bâtiments en zone urbaine
Nouvelle donne pour la surélévation des bâtiments en zone urbaine
Pour que le permis de construire soit accepté du premier coup, l’architecte Florence Gaudin a mis toutes les chances de leur côté en soignant particulièrement « l’insertion dans le contexte » : « C’est un thème cher à notre atelier. Nous travaillons ni en mimétisme ni en rupture avec l’existant mais comme une rencontre », explique-t-elle.
Comme le bâtiment de départ était construit selon un système de boîtes qui s’empilent en se rétrécissant, les architectes ont gardé ce principe : « La volumétrie de la surélévation est constituée de plusieurs édicules emboîtés, dont le revêtement en zinc est posé alternativement horizontalement et verticalement. »
Comme le bâtiment de départ était construit selon un système de boîtes qui s’empilent en se rétrécissant, les architectes ont gardé ce principe : « La volumétrie de la surélévation est constituée de plusieurs édicules emboîtés, dont le revêtement en zinc est posé alternativement horizontalement et verticalement. »
Et pour garder les codes de la capitale, la surélévation a été pensée avec un couronnement qui rappelle les toits de Paris. « Le zinc est le bardage le plus résistant qui existe. Toujours dans un souci d’intégration, nous avons choisi une finition prépatinée pour rappeler le soubassement en pierre bleue de l’immeuble et éviter l’aspect brillant du zinc neuf. »
Enfin, l’architecte a présenté un projet avec ossature bois, un mode de construction sec et rapide, moins gênant en ville qu’une maçonnerie traditionnelle. Il permet en particulier de prémonter les éléments en atelier et de limiter au maximum la durée d’intervention sur place.
Enfin, l’architecte a présenté un projet avec ossature bois, un mode de construction sec et rapide, moins gênant en ville qu’une maçonnerie traditionnelle. Il permet en particulier de prémonter les éléments en atelier et de limiter au maximum la durée d’intervention sur place.
Peu de projets de ce types aboutissent néanmoins car la pierre d’achoppement est le passage devant l’assemblée de copropriété qui exige l’acceptation à la majorité des copropriétaires (avec un minimum des deux tiers des voix selon la loi Alur). Bien préparé, le maître d’ouvrage a pleinement obtenu le soutien des votants.
« Il n’a pas ménagé sa peine en amont de cette assemblée, prenant le risque de faire mener des études sérieuses sur la structure du bâtiment et les données aérauliques. Il a également fait travailler le géomètre pour déterminer l’état de divisions des lots [connaître le nombre de tantièmes qu’il récupérerait, NDLR]. Nous avons également fait la demande de permis et l’avons obtenu avant même d’avoir l’acceptation de la copropriété », explique l’architecte.
« Il n’a pas ménagé sa peine en amont de cette assemblée, prenant le risque de faire mener des études sérieuses sur la structure du bâtiment et les données aérauliques. Il a également fait travailler le géomètre pour déterminer l’état de divisions des lots [connaître le nombre de tantièmes qu’il récupérerait, NDLR]. Nous avons également fait la demande de permis et l’avons obtenu avant même d’avoir l’acceptation de la copropriété », explique l’architecte.
Le projet comportait aussi la demande de réfection de la passerelle qui permet de se rendre à l’appartement : « Elle obligeait le propriétaire à avoir deux portes d’entrée successives à chaque bout de la galerie, ce qui n’était pas très pratique. Tout en béton, elle n’était pas en très bon état de surcroît. »
Ce nouveau couloir vitré et végétalisé, avec ses coffres de rangement en chêne, est à la hauteur du standing de la nouvelle construction. À l’extérieur, il a été entièrement bardé de zinc comme la toiture et les façades de l’extension.
En entrant dans l’appartement, on rejoint désormais le nouvel étage et son extension de 54 m² via cet escalier magistral. Tout en légèreté, l’escalier en acier et chêne lamellé collé dispose d’un garde-corps constitué de câbles en kevlar provenant d’une corderie de marine.
« Nous désirions qu’il laisse une transparence visuelle maximale entre les deux étages. Il a nécessité beaucoup de calculs afin d’être techniquement validé par le bureau de contrôle », affirme l’architecte.
Plan de l’extension
À l’étage, l’extension se présente comme une suite parentale et une pièce de vie épurées et largement vitrées : « Les propriétaires souhaitaient que nous conservions les qualités d’ouverture en plein ciel de la toiture-terrasse existante », justifie Florence Gaudin.
L’effet luxueux du projet provient de la recherche de porosité totale entre l’intérieur et l’extérieur : une baie escamotable de part et d’autre de la pièce de vie offre en effet une ouverture complètement traversante.
L’accès des pièces sur les terrasses se fait au moyen de très grandes baies vitrées à galandage, qui coulissent entièrement dans les murs jusqu’à se faire oublier.
Au sol, les guides ont été intégrés le plus discrètement possible, à fleur du revêtement.
Baies vitrées haute performance : Technal
Au sol, les guides ont été intégrés le plus discrètement possible, à fleur du revêtement.
Baies vitrées haute performance : Technal
Le choix du revêtement de sol a demandé une réflexion particulière. Le propriétaire souhaitait à l’origine des terrasses en bois et un plancher chêne dans les pièces de vie pour leur aspect chaleureux. Mais l’architecte l’a judicieusement mis en garde contre le vieillissement différent des deux bois qui créerait au fil du temps une rupture visuelle alors que la continuité des lignes était l’objectif.
« Dans une optique de pérennité du rendu visuel, nous avons utilisé un grès cérame imitation bois identique en intérieur et extérieur, un matériau qui s’est avéré difficile à trouver en raison des normes pour l’extérieur engendrées par la pose sur plots. Nous avons finalement choisi le modèle Nau chez Mirage, une belle imitation avec un effet légèrement texturé. À l’extérieur nous avons opté pour sa variante antidérapante », détaille Florence Gaudin.
L’effet traversant latéral procuré par les baies vitrées a été renforcé par une verrière centrale qui joue le rôle de puits de lumière : « Les “boîtes” qui composent le projet ont été reliées par une grande verrière, espace de vie en plein ciel pensé comme une terrasse couverte, un dedans-dehors. »
Ce type de construction toute vitrée va de pair avec une étude thermique et phonique poussée : « Nous avons opté pour des vitrages de très haute performance couplés à des volets roulants électriques sur l’intégralité des baies, y compris au plafond, qui évitent la surchauffe estivale. Nous avons posé une climatisation réversible qui sert exceptionnellement en fonction refroidissement et un plancher tempéré électrique. Le volume très bien isolé au niveau thermique se réchauffe et se refroidit très vite. Quant à la contrainte phonique, les normes contre le feu imposent deux épaisseurs de BA15 ce qui le rend très bien isolé. »
La pièce de vie a été conçue comme une salle à manger et une cuisine d’été. La cuisine occupe l’un des côtés de l’espace avec la verrière. « C’est devenu le lieu préféré du couple pour prendre son petit déjeuner », affirme Florence.
La chambre parentale se trouve dans le prolongement de la pièce de vie et s’ouvre elle aussi sur la terrasse.
Une double circulation permet d’atteindre la chambre parentale depuis la pièce principale : « Nous avons réfléchi l’espace en termes de parcours multiples. Que l’on puisse passer d’un côté ou de l’autre donne un sentiment de liberté. »
Derrière la tête de lit se trouvent des étagères et un coffre de rangement car « il a fallu composer au mieux avec une gaine présente à cet endroit renfermant une canalisation d’évacuation ».
La salle de bains a été elle aussi aménagée de façon minimaliste et luxueuse. Une vasque en marbre Calacatta surplombe un meuble réalisé sur la base de panneaux de construction Wedi sur lesquels ont été posés des carreaux imitation marbre coupés à l’onglet. Un bandeau LED souligne le graphisme épuré du miroir tandis qu’une fenêtre de toit, placée au-dessus de la douche à l’italienne, permet de se doucher avec vue sur ciel.
Il est possible d’accéder à la toiture en empruntant cet escalier intégré dans le volume de l’extension.
Les travaux ont duré 4 mois. Tandis que le chantier se concentrait sur la construction de l’extension et la rénovation de la passerelle, le propriétaire a pu rester dans son appartement mais il a dû déménager les deux derniers mois, lorsque les étages ont été réunis et les finitions intérieures réalisées.
Ce projet complet et bien ficelé a emporté l’adhésion et l’admiration mais, si vous aussi envisagez de vous lancer, sachez qu’il demande une certaine solidité, psychologique et financière. En effet, il a fallu deux ans de patience aux propriétaires pour voir le projet s’achever et une implication loin d’être à la portée de tous : « Le maître d’ouvrage s’est consacré aux démarches pendant un an avant l’assemblée et a tout de même dépensé 5 % du budget de la réalisation sans même savoir si le projet pourrait véritablement se faire. Ces éléments d’étude ont néanmoins été essentiels pour témoigner du sérieux et de la détermination de la famille et je pense que le fait qu’ils soient dans l’immeuble depuis neuf ans a également beaucoup compté », analyse Florence Gaudin.
On ne saurait trop insister également sur le choix d’un architecte dimensionné, capable de gérer une construction dans un immeuble : « Cette extension a la taille de celles que l’on fait communément dans les maisons mais à l’échelle d’une résidence. Quand il s’agit de faire les études préalables sur la hauteur ou les fluides, c’est sur l’immeuble entier qu’il faut les réaliser. Et il faut réussir à organiser le chantier en gênant le moins possible l’ensemble des propriétaires… », souligne Florence Gaudin.
Malgré tous ces écueils, l’architecte estime que ce type de projets difficiles et onéreux demeure rentable à Paris et petite couronne, où les prix de l’immobilier s’envolent.
Malgré tous ces écueils, l’architecte estime que ce type de projets difficiles et onéreux demeure rentable à Paris et petite couronne, où les prix de l’immobilier s’envolent.
Plan des toitures
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Qui habite ici : une famille
Emplacement : dans un immeuble construit en 2005 à Paris XIIIᵉ
Livraison : 2017
Durée des travaux : 4 mois de construction et 2 mois de finition
Superficie : appartement initial 80 m² + surélévation de 54 m² avec terrasses
Architecte : Florence Gaudin
Budget : 300 000 euros
Crédit photos : Pierre L’Excellent