Contributrice Houzz. Créatrice, rédactrice et photographe. Une palette large, comme la somme de toutes mes expériences:
- l'esprit récup et le détournement d'objet (upcycling), l'éclectisme, car inventive, créatrice notamment de mobilier en troncs et en branches d'arbres.
- les meubles de famille et de style, le vintage, car historienne de formation,
- la photographie et le style Arty car ex-journaliste de la presse parisienne, ayant beaucoup fréquenté les galeries d'art, les salons et les musées.
- la restauration et/ou le relooking de mobilier car formée pendant 3 ans à la patine, la réfection de sièges.
Je suis chef d'entreprise en métiers d'Art et contributrice Houzz depuis 2015.
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Parmi les éléments décoratifs qui portent à croire que la déco est un éternel recommencement, le cannage figure en bonne place ! Depuis que les Anglais et les Hollandais, au début du XVIIᵉ siècle, ont rapporté la canne de rotin d’Extrême-Orient, chaque siècle l’a vu ressurgir sur le mobilier. En France, on découvre le cannage sous la Régence puis Louis XV. On en use et abuse sous Louis XVI : fauteuils et banquettes, panneaux de lit, etc. Il revient ensuite sous Louis-Philippe. Il se modernise et se démocratise jusqu’aux cafés entre le XIXᵉ siècle et le début du XXᵉ siècle, notamment grâce à Michael Thonet. Même la maison Dior s’empare de chaises cannées dans sa villa, puis comme motif iconique dans les années 50 pour ses diverses créations. Aujourd’hui, à la faveur du retour en force des fibres naturelles, mais aussi d’inspirations des XIXᵉ et XXᵉ siècles revisité par les designers contemporains, les meubles cannés s’offrent une nouvelle cure de jouvence.
La technique est ancienne et révèle un vrai savoir-faire : le tressage de la fibre de rotin. À chaque siècle, les plus grands noms de menuisiers en mobilier, notamment en sièges, s’en sont emparés : Georges Jacob, Louis et Michel Cresson au XVIIIᵉ siècle, Pierre Nogaret au XIXᵉ, jusqu’à Mickael Thonet qui industrialise la première chaise cannée.
Sur cette image, on peut voir le bureau Allegory, conçu en 2015 par GamFratesi pour Gebrüder Thonet Vienna, l’une des trois entités nées de la scission de Thonet.
Si aujourd’hui de nombreux designers se le réapproprient, les décorateurs comme Sarah Lavoine n’hésitent pas à l’intégrer dans leurs projets déco les plus contemporains. Ici, la banquette vintage à double siège assure le charme de ce salon d’un duplex parisien. Pour ceux qui pensent encore, souvent à tort, qu’il s’agit d’un matériau peu solide, déformable, notons qu’il n’a pas pris une ride !
Les chaises médaillons Louis XVI séduisent toujours autant. On les a connues avec un revêtement de tissu ou cannées, on les revisite aujourd’hui en mixte : mi-cannées, mi-rembourrées. Elles se marient tout aussi bien avec un style Shabbychic qu’avec de nombreuses ambiances inspirées du nord de l’Europe.
Ici, ce fauteuil de bureau dit « couillard » assure le charme parisien et authentique de l’appartement du styliste Philippe Model. Certains préféreront le cannage en fibre naturelle, d’autres peint en blanc ou en crème patiné, pour un look plus intemporel encore.
Les deux sont forcément liés puisque, rappelons-le, le cannage utilise la canne de rotin tissée sur châssis. La technique artisanale du cannage utilise six fils : fil de chaîne à la verticale, fil de trame en perpendiculaire. Puis on croise les deux derniers fils pour ce rendu. On appelle cela l’ourdissure, la monture et la garniture. Aujourd’hui encore, on produit artisanalement ou industriellement du mobilier canné, comme cette banquette Ulla. Les pays scandinaves en raffolent.
La fibre naturelle s’entend à merveille avec les matières douces, le coton, la soie, le velours. Les bois clairs comme le hêtre s’y associent superbement. On le retrouve donc en tête de lit enveloppante, en paniers pour y déposer ses plaids. Bien évidemment, les fauteuils cannés se parent de coussins pour un effet encore plus cosy.
En ton naturel, le siège canné s’accorde aussi avec les ambiances inspirées par la nature. Par exemple, un fauteuil de jardin près d’une fenêtre par laquelle on aperçoit la nature verdoyante, ou encore accompagné d’une déco exotique devant un papier peint jungle. Certains fabricants éditent même du mobilier de jardin qui reprend le motif cannage mais en résine de synthèse, pour qu’il soit réellement outdoor.
Autrefois, surtout dans les pays du nord de l’Europe, on recouvrait les sièges cannés de coussins l’hiver pour éviter les courants d’air : une adaptation chaleureuse d’une matière importée par la Compagnie des Indes dans des pays froids. Ici, ce fauteuil de bureau en garde l’esprit. Cela lui confère même un look aventurier, explorateur. Il y gagne en élégance aussi.
L’iconique fauteuil du film Emmanuelle, en 1974, était à la base un fauteuil tahitien en fibres de rotin juste entrecroisées. On l’a depuis revisité en plusieurs motifs, notamment en cannage. Puis il a pris des couleurs comme ici, en bleu turquoise, pour une ambiance bohemian et arty !
Au XXᵉ siècle, même les chaises cantilever ont eu le droit à leur version cannée pour changer du cuir. En 1929, Marcel Breuer revisite la chaise tubulaire d’esprit industriel en cannage pour plus de naturel. C’est la S32. Elle fut produite par… Thonet ! Elle est aussi rééditée aujourd’hui.
Si auparavant, les fabricants osaient les banquettes entièrement cannées, la mode est aujourd’hui aux canapés qui associent plusieurs matières. Pour exemple, ce canapé Cannage qui est en bois massif teinté noir tandis que ses côtés sont en trame cannée. Son look se veut résolument léger et confortable. Il joue de la transparence et se marie aussi bien avec le coton qu’il le pourrait avec le velours. Dans le même style, Gebrüder Thonet Vienna a relancé aussi une collection de fauteuils Hideout en évitant le cannage total !
De style tout à fait baroque, on l’appelle généralement fauteuil carrosse ou quelquefois cage. Cet étrange siège en forme de berceau vertical se décline aussi en rotin et en cannage. Il s’agit ni plus ni moins d’un fauteuil Régence, ou d’une bergère, surmonté d’un dôme. Une alternative au fauteuil dit Emmanuelle pour ceux et celles qui adorent se lover dans un grand fauteuil enveloppant.
En banc d’appoint
Autrefois, ce genre de banc, souligné par son entretoise en X servait de banc de piano, où élève et professeur, mère et enfant s’asseyaient pour la leçon. Au XIXᵉ siècle, avant l’installation des ascenseurs dans les immeubles haussmanniens, on disposait des bancs aux étages pour se reposer. Ils étaient généralement cannés, mais ils ont également disparu. Si quelques heureux propriétaires en ont conservé, ils les détournent comme ici en bancs d’appoint dans une salle de bains, une entrée ou un dressing.
De la première chaise à porteurs cannée à la chaise de bistrot en passant par la chaise Régence, de cabinet, d’aisance, l’assise et parfois le dossier cannés ont connu toutes les formes et les styles. Excepté sous le règne de Louis XIV ou l’Empire napoléonien, puisqu’ils avaient tout deux rompu leurs relations commerciales avec l’Angleterre et la Hollande, privant les menuisiers de canne de rotin.
Sobre et chic, ajouré, le cannage des lits a connu son heure de gloire à la fin du XIXᵉ siècle. Parfois de manière encore plus exubérante, avec un cannage soleil ou en éventail sous le Second Empire. Aujourd’hui, les designers s’en inspirent pour des têtes de lit à la fois élégantes et décontractées.
Le cannage se retrouve aussi en panneau de paravent, en portes d’armoire et même en suspensions dans des chambres très inspirées !
Bien entendu, la marque Thonet a fait les beaux jours de la chaise bistrot en bois tournée, rapidement assortie d’une assise cannée. L’emblématique chaise n° 14, créée par l’ébéniste en 1859, s’est installée dans le mobilier français pour ne plus le quitter jusqu’à aujourd’hui. Éditée en série, elle est sans cesse revisitée, comme ici, customisée avec une couleur jaune citron.
Encore un de ses fleurons qui s’est vite démocratisé : le rocking-chair Fischel en hêtre courbé berce aujourd’hui encore les bébés dans leur chambre. Ce modèle de Michael Thonet est sorti en 1860, reprenant la même idée que la chaise n° 14 : le mix d’un bois courbé par la chaleur et un cannage pour un siège solide et visuellement aérien.
Comment restaurer son mobilier canné ? Vos chaises Régence héritées de votre aïeule ou chinées auraient besoin d’être refaites ? Faites appel à un canniste pour un travail dans les règles de l’art. Il tirera la fibre et la fixera dans les trous. Vous verrez les coutures en dessous… Dans ce cas, les losanges formés ne seront pas tout à fait réguliers, preuve de l’artisanat !
Vous trouverez également des lés de cannage déjà tissés, vendus au mètre (certains sont en fibres synthétiques). Ils peuvent être collés sous un brin de canne de rotin de 3,5 millimètres, après avoir été trempés dans l’eau. Plus rapide, plus facile, moins cher, ils sont aussi moins solides dans le temps.
ET VOUS ? Vous avez des meubles cannés ? Partagez vos photos et vos astuces déco dans la partie commentaires ci-dessous !
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- L’art de s’adapter aux époques
La technique est ancienne et révèle un vrai savoir-faire : le tressage de la fibre de rotin. À chaque siècle, les plus grands noms de menuisiers en mobilier, notamment en sièges, s’en sont emparés : Georges Jacob, Louis et Michel Cresson au XVIIIᵉ siècle, Pierre Nogaret au XIXᵉ, jusqu’à Mickael Thonet qui industrialise la première chaise cannée.Sur cette image, on peut voir le bureau Allegory, conçu en 2015 par GamFratesi pour Gebrüder Thonet Vienna, l’une des trois entités nées de la scission de Thonet.