Focus Matière
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Focus Matière : Le terrazzo, du revêtement au motif tendance
Ce revêtement issu de l'Antiquité a la cote ! Retour sur sa saga et les causes de son succès
Le dernier salon Maison&Objet a clairement confirmé le retour sur la scène design du motif terrazzo, ce moucheté aléatoire, coloré à souhait et délicieusement vintage. Cette tendance nous donne envie de plonger plus avant dans la connaissance de ce matériau un temps oublié, d’apprécier ses nouveaux emplois et d’analyser les raisons pour lesquelles il est redevenu récemment l’un des motifs les plus inspirants de la planète design.
Le processus initial de pose du terrazzo était délicat. Un substrat constitué de terre, sable et fragments de pierre et de marbre lié avec de la chaux était posé puis pressé avec un rouleau. Sur celui-ci était appliqué un papier glacé perforé sur lequel était positionné le motif. Un lit de chaux, terre, sable et poudre de brique était alors appliqué, sur lequel étaient semés en trois passes les granulats : d’abord les plus gros, puis la taille intermédiaire et enfin les plus fins. Après un séchage qui pouvait aller jusqu’à 80 jours, le sol était soigneusement poli à la meule puis traité à l’huile de lin.
Au fil du temps, le terrazzo a conquis le secteur de la construction par sa résistance mécanique, son coût moins élevé et sa plus grande facilité de mise en œuvre qu’un dallage de marbre, ainsi que par ses possibilités de coloris infinies.
Dans les années 20-30, à l’époque Art déco, il a recouvert à profusion les sols, les escaliers, les plans de travail cuisine et même les vasques des salles de bains. Le terrazzo, coulé ou moulé, est alors réalisé à base de ciment et non plus de chaux, ce qui réduit beaucoup le temps de séchage.
Au fil du temps, le terrazzo a conquis le secteur de la construction par sa résistance mécanique, son coût moins élevé et sa plus grande facilité de mise en œuvre qu’un dallage de marbre, ainsi que par ses possibilités de coloris infinies.
Dans les années 20-30, à l’époque Art déco, il a recouvert à profusion les sols, les escaliers, les plans de travail cuisine et même les vasques des salles de bains. Le terrazzo, coulé ou moulé, est alors réalisé à base de ciment et non plus de chaux, ce qui réduit beaucoup le temps de séchage.
Dans les années 50-60, pour en faciliter encore la mise en œuvre, on en fabrique des dalles de 20 x 20 centimètres, qui s’utilisent comme du carrelage mais n’ont pas le charme du terrazzo artisanal.
Clin d’œil vintage, cette réalisation contemporaine signée par l’architecte d’intérieur Baptiste Legué remet à l’honneur ce matériau dont on s’est en réalité complètement détourné pendant vingt ans, jusque dans les années 80.
Clin d’œil vintage, cette réalisation contemporaine signée par l’architecte d’intérieur Baptiste Legué remet à l’honneur ce matériau dont on s’est en réalité complètement détourné pendant vingt ans, jusque dans les années 80.
Le terrazzo refait alors surface sous l’impulsion du Groupe Memphis, un mouvement design fondé en 1981 en Italie par Ettore Sottsass rassemblant les designers Michele de Lucchi, Matteo Thun ou encore Andrea Branzi… Dans une démarche de réinvention du design, ces derniers dépoussièrent des matériaux traditionnels bon marché, comme le terrazzo, et en font une source d’expérimentation. Comme sur ce plan de travail de cuisine par exemple, on explore la résine époxy en tant que liant, les morceaux de verre en tant que granulats, ce qui permet de recycler des matériaux.
En 2010, le motif terrazzo acquiert de nouvelles lettres de noblesse design en France lorsque l’ancienne piscine Lutetia est transformée par l’architecte Lucien Béguet pour accueillir la boutique Hermès parisienne. Construit en 1935 dans le style Art déco, le bassin de la piscine primitivement pavé de restes de céramique, sur le modèle du sol de cette entrée, est remplacé par un plancher dallé de terrazzo. Ce matériau inspire d’ailleurs Hermès au point qu’en 2015, l’atelier d’Hermès, Petit h, le revisite en semant dans le mortier des boutons, boucles et cadenas provenant de 35 ans de restes de créations Hermès.
Depuis, le terrazzo ne cesse d’inspirer les créateurs contemporains à l’instar du céramiste Sevak Zargarian qui vient d’exposer ces pièces lors de la manifestation Ceramic Art London 2017. Ce designer basé à Londres, qui se passionne pour l’exploration des matières, réalise ces pièces d’art de la table contemporaines. Elles sont en argile, parsemées de copeaux colorés coulées dans des moules. Le polissage de la surface fait ressortir couleurs et motifs aléatoires et rend chaque pièce unique.
Le jeune designer danois Troels Flensted fabrique quant à lui des tables aux plateaux en terrazzo. Cette collection réalisée dans une démarche d’expérimentation des matériaux, couleurs et motifs a été présentée à Paris, au salon Maison&Objet de janvier 2016.
La jeune marque parisienne Papermint explore à son tour le motif terrazzo et joue sur la taille des inclusions colorées et les grossit exagérément afin de le renouveler de façon intéressante. Voici notamment le papier peint intissé Granite de la collection Memphis, qui revendique explicitement sa filiation avec les designers italiens des années 80.
Cette profusion de créations actuelles autour du terrazzo nous amène à analyser pourquoi il plaît autant. Plusieurs arguments pourraient être avancés.
Le terrazzo est un matériau ancestral qui donne à nos intérieurs en quête d’authenticité une touche vintage appréciée. Pour nous plonger dans les années 50, l’architecte d’intérieur Lorraine Colson le mixe dans cette salle de bains avec un mobilier danois mid-century et des murs céladon.
Le terrazzo est un matériau ancestral qui donne à nos intérieurs en quête d’authenticité une touche vintage appréciée. Pour nous plonger dans les années 50, l’architecte d’intérieur Lorraine Colson le mixe dans cette salle de bains avec un mobilier danois mid-century et des murs céladon.
Le terrazzo est également un fourre-tout qui se prête au recyclage de multiples matériaux, comme le faisaient déjà les anciens. En effet, au temps du Bas-Empire romain, les spolia désignaient les réemplois d’œuvres d’art et de monuments romains antérieurs comme matériaux de construction dans un nouveau monument, à l’instar de l’arc de Constantin. Cette démarche d’upcycling avant l’heure nous parle particulièrement en temps de crise, où l’on cherche à économiser les matières premières.
Sans recette fixe, on note que le terrazzo est par conséquent personnalisable à souhait : couleur, taille et nombre des inclusions, tout est à inventer à son goût. Son résultat aléatoire, fruit du hasard du mélange, est un argument design de poids. On pourrait dire du terrazzo qu’il incarne une parfaite liberté de la matière. Authenticité, éco-conscience, liberté : autant de valeurs qui garantissent à cette matière un bel avenir !
ET VOUS ?
Que pensez-vous du terrazzo ?
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Ce savoir-faire qui consiste à faire des sols mouchetés à partir de granulats de pierre et marbre colorés, agglomérés avec un mortier puis lissés, devient un véritable art en Vénétie à la Renaissance. Ces revêtements sont alors incrustés de motifs en mosaïque et décorent les riches palais vénitiens. Le terrazzo a d’ailleurs gardé le nom d’une commune du nord-est de l’Italie entre Vérone et Venise, mais on le trouve aussi sous l’appellation granito, par référence au granit, pierre naturellement mouchetée.