Architecture
Le Corbusier : Dans les coulisses de 8 œuvres du modernisme
Découvrez les anecdotes méconnues sur les sites incontournables de l'architecte, de la Cité radieuse à Chandigarh !
Inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco depuis juillet 2016, à travers 17 sites emblématiques, l’œuvre de Charles-Édouard Jeanneret-Gris, connu sous le nom de Le Corbusier, est reconnue dans le monde entier comme ayant joué un rôle essentiel dans le mouvement moderne. Ce patrimoine, dont les édifices ont pour la plupart conservé leur usage original, a introduit de nouvelles idées dans l’architecture, comme le fonctionnalisme, le purisme et le rapport avec la nature. « Avant le XXᵉ siècle, les architectes étaient peu nombreux et travaillaient pour une élite. Au XXᵉ siècle, les besoins changent. L’essor démographique oblige à trouver d’autres solutions, à inventer une manière de faire de l’architecture avec des formes plus simples, des processus plus rapides et moins chers, pour un rendu qualitatif. Le Corbusier fait partie des architectes qui tentent alors de faire une nouvelle architecture s’adressant à tout le monde », explique Gilles Ragot, membre du Comité des experts pour l’œuvre architecturale de Le Corbusier.
Sur les 78 bâtiments construits dans douze pays différents et les 400 projets sur lesquels l’architecte franco-suisse a travaillé au cours de sa carrière, huit sites incontournables nous ont ouvert leurs portes. Des experts de l’œuvre de Le Corbusier racontent les secrets et anecdotes qui ont rythmé leur vie avant et après le décès de l’architecte, dont le cinquantième anniversaire a été célébré en 2015.
Sur les 78 bâtiments construits dans douze pays différents et les 400 projets sur lesquels l’architecte franco-suisse a travaillé au cours de sa carrière, huit sites incontournables nous ont ouvert leurs portes. Des experts de l’œuvre de Le Corbusier racontent les secrets et anecdotes qui ont rythmé leur vie avant et après le décès de l’architecte, dont le cinquantième anniversaire a été célébré en 2015.
2. La Villa « Le Lac »
Coup d’œil
Pour qui a-t-elle été construite ? Georges Édouard Jeanneret et Marie Charlotte Amélie Jeanneret-Perret, les parents de Le Corbusier
Emplacement : Corseaux, Suisse
Date de construction : 1923
Caractéristiques principales : La construction rassemble déjà trois des futurs cinq points d’une architecture nouvelle, soit le toit-terrasse, le plan libre et la fenêtre en longueur.
Après avoir construit une première maison pour ses parents en 1912, vendue quelques années plus tard en raison de sa surface trop étendue et de son manque de praticité pour le couple d’âge mûr, Charles-Édouard Jeanneret-Gris réalise un autre bâtiment à Corseaux, en Suisse. Il dispose d’un budget limité pour ce projet, correspondant à l’argent de la vente de la première maison que le nouvel acquéreur ne terminera jamais de payer. Le Corbusier parvient tout de même à concevoir ce qui est considéré aujourd’hui comme l’un des actes fondateurs de la nouvelle architecture moderne, et la Villa « Le Lac » voit le jour sur un terrain situé au bord du lac Léman, dont le prix est avantageux en raison de sa typologie difficile.
Contrairement aux autres constructions de l’architecte, sur lesquelles il reviendra très peu, la Villa a évolué avec le temps. Le Corbusier revient souvent dans la maison de ses parents pour y apporter des améliorations : « La Villa est située à 4 mètres du lac et dispose d’une cave. Année après année, la montée annuelle des eaux du lac a poussé la cave vers le haut et la maison s’est littéralement cassée en deux. Le Corbusier a remédié au problème en installant une charnière - un joint de dilatation - dans le toit, permettant ainsi une “respiration” à la Villa. De même, il a recouvert la façade sud d’un bardage d’aluminium, pour cacher la grande fissure qui courait de bas en haut, et éviter ainsi les “émotions visuelles” », raconte Patrick Moser, conservateur de la Villa « Le Lac ».
Le paulownia de la Villa « Le Lac »
Le Corbusier voulait à tout prix planter un paulownia dans le jardin de ses parents. Cet arbre originaire du nord de la Chine voit ses fleurs éclore au mois de mai. « La période de floraison était très importante alors que l’architecte avait imaginé une ronde de fleurs dans le jardin, avec des végétaux qui fleurissent à différentes périodes de l’année », précise Patrick Moser. Après avoir refusé des arbres similaires, l’architecte plante finalement le fameux végétal, dont les feuilles ombragent les lieux pendant plusieurs années. Il finit par être abattu en 2012 suite à une taille inappropriée six ans plus tôt ayant entraîné la mort. « Je voulais faire quelque chose avec le bois de l’arbre et j’avais pensé à des crayons pour les architectes, mais le matériau était trop léger. L’école cantonale d’art de Lausanne filme finalement l’abattage du paulownia tandis que Cassina, en collaboration avec le designer Jaime Hayon, produit trois objets dans le bois du paulownia », raconte le conservateur. Aujourd’hui, la mémoire de l’arbre continue de vivre dans trois objets décoratifs : The Bird, The Bird House et The Ledge. L’histoire aurait pu s’arrêter là si une branche du paulownia n’avait pas été retrouvée quatre mois après avoir planté un nouvel arbre dans le mur de soutènement de la maison. Elle grandit désormais tranquillement avant de prendre la relève de son ancêtre dans le jardin de la Villa « Le Lac ».
Coup d’œil
Pour qui a-t-elle été construite ? Georges Édouard Jeanneret et Marie Charlotte Amélie Jeanneret-Perret, les parents de Le Corbusier
Emplacement : Corseaux, Suisse
Date de construction : 1923
Caractéristiques principales : La construction rassemble déjà trois des futurs cinq points d’une architecture nouvelle, soit le toit-terrasse, le plan libre et la fenêtre en longueur.
Après avoir construit une première maison pour ses parents en 1912, vendue quelques années plus tard en raison de sa surface trop étendue et de son manque de praticité pour le couple d’âge mûr, Charles-Édouard Jeanneret-Gris réalise un autre bâtiment à Corseaux, en Suisse. Il dispose d’un budget limité pour ce projet, correspondant à l’argent de la vente de la première maison que le nouvel acquéreur ne terminera jamais de payer. Le Corbusier parvient tout de même à concevoir ce qui est considéré aujourd’hui comme l’un des actes fondateurs de la nouvelle architecture moderne, et la Villa « Le Lac » voit le jour sur un terrain situé au bord du lac Léman, dont le prix est avantageux en raison de sa typologie difficile.
Contrairement aux autres constructions de l’architecte, sur lesquelles il reviendra très peu, la Villa a évolué avec le temps. Le Corbusier revient souvent dans la maison de ses parents pour y apporter des améliorations : « La Villa est située à 4 mètres du lac et dispose d’une cave. Année après année, la montée annuelle des eaux du lac a poussé la cave vers le haut et la maison s’est littéralement cassée en deux. Le Corbusier a remédié au problème en installant une charnière - un joint de dilatation - dans le toit, permettant ainsi une “respiration” à la Villa. De même, il a recouvert la façade sud d’un bardage d’aluminium, pour cacher la grande fissure qui courait de bas en haut, et éviter ainsi les “émotions visuelles” », raconte Patrick Moser, conservateur de la Villa « Le Lac ».
Le paulownia de la Villa « Le Lac »
Le Corbusier voulait à tout prix planter un paulownia dans le jardin de ses parents. Cet arbre originaire du nord de la Chine voit ses fleurs éclore au mois de mai. « La période de floraison était très importante alors que l’architecte avait imaginé une ronde de fleurs dans le jardin, avec des végétaux qui fleurissent à différentes périodes de l’année », précise Patrick Moser. Après avoir refusé des arbres similaires, l’architecte plante finalement le fameux végétal, dont les feuilles ombragent les lieux pendant plusieurs années. Il finit par être abattu en 2012 suite à une taille inappropriée six ans plus tôt ayant entraîné la mort. « Je voulais faire quelque chose avec le bois de l’arbre et j’avais pensé à des crayons pour les architectes, mais le matériau était trop léger. L’école cantonale d’art de Lausanne filme finalement l’abattage du paulownia tandis que Cassina, en collaboration avec le designer Jaime Hayon, produit trois objets dans le bois du paulownia », raconte le conservateur. Aujourd’hui, la mémoire de l’arbre continue de vivre dans trois objets décoratifs : The Bird, The Bird House et The Ledge. L’histoire aurait pu s’arrêter là si une branche du paulownia n’avait pas été retrouvée quatre mois après avoir planté un nouvel arbre dans le mur de soutènement de la maison. Elle grandit désormais tranquillement avant de prendre la relève de son ancêtre dans le jardin de la Villa « Le Lac ».
3. La cité Frugès
Coup d’œil
Pour qui a-t-elle été construite ? Henry Frugès, un riche industriel sucrier
Emplacement : Pessac, France
Date de construction : Entre 1924 et 1926
Caractéristiques : Un ensemble de 51 maisons destinées aux ouvriers, qui expérimentent les cinq points d’une architecture nouvelle, et réparties en six typologies différentes, dont « maison Gratte-ciel », « maison Isolée », « maison Jumelle », « maison Arcade », « maison Quinconce » et « maison Zig-zag ».
La cité Frugès est innovante tant sur les plans esthétique, technique que social. Alors qu’il cherche à loger les ouvriers de sa scierie, l’industriel sucrier Henry Frugès est séduit par les propositions novatrices de Le Corbusier, qui rendent notamment possible la construction standardisée. Ils décident de réaliser ensemble une cité de 127 maisons à Pessac, dont seulement 51 bâtiments verront finalement le jour. « Il y avait beaucoup plus de confort dans ces maisons que dans certains hôtels aristocratiques de Bordeaux. Il était révolutionnaire à l’époque de construire de tels logements pour des ouvriers et de leur donner accès à la propriété contre l’équivalent d’un an de salaire », raconte Cyril Zozor, chargé de mission de développement de la cité Frugès-Le Corbusier à la mairie de Pessac. « En réalité, il ne s’agissait pas d’une cité ouvrière, mais d’un quartier moderne adressé à des ménages qui n’existaient pas encore, à une société en devenir. » Pour toutes ces raisons, Le Corbusier et Henry Frugès vont être confrontés à l’attitude réticente de certains acteurs, comme la ville de Pessac, qui rechigne à faire les travaux de raccordement de réseau nécessaires à l’installation de l’eau courante. « Certains détracteurs du projet sont allés jusqu’à penser que des maladies se développeraient dans la cité en raison de la forte densité de population, inhabituelle pour l’époque », poursuit Cyril Zozor. Les maisons ont finalement été vendues à partir de 1929, soit trois ans après leur construction, quand la ville de Pessac a achevé les travaux, et les premiers habitants sont arrivés en 1930.
Coup d’œil
Pour qui a-t-elle été construite ? Henry Frugès, un riche industriel sucrier
Emplacement : Pessac, France
Date de construction : Entre 1924 et 1926
Caractéristiques : Un ensemble de 51 maisons destinées aux ouvriers, qui expérimentent les cinq points d’une architecture nouvelle, et réparties en six typologies différentes, dont « maison Gratte-ciel », « maison Isolée », « maison Jumelle », « maison Arcade », « maison Quinconce » et « maison Zig-zag ».
La cité Frugès est innovante tant sur les plans esthétique, technique que social. Alors qu’il cherche à loger les ouvriers de sa scierie, l’industriel sucrier Henry Frugès est séduit par les propositions novatrices de Le Corbusier, qui rendent notamment possible la construction standardisée. Ils décident de réaliser ensemble une cité de 127 maisons à Pessac, dont seulement 51 bâtiments verront finalement le jour. « Il y avait beaucoup plus de confort dans ces maisons que dans certains hôtels aristocratiques de Bordeaux. Il était révolutionnaire à l’époque de construire de tels logements pour des ouvriers et de leur donner accès à la propriété contre l’équivalent d’un an de salaire », raconte Cyril Zozor, chargé de mission de développement de la cité Frugès-Le Corbusier à la mairie de Pessac. « En réalité, il ne s’agissait pas d’une cité ouvrière, mais d’un quartier moderne adressé à des ménages qui n’existaient pas encore, à une société en devenir. » Pour toutes ces raisons, Le Corbusier et Henry Frugès vont être confrontés à l’attitude réticente de certains acteurs, comme la ville de Pessac, qui rechigne à faire les travaux de raccordement de réseau nécessaires à l’installation de l’eau courante. « Certains détracteurs du projet sont allés jusqu’à penser que des maladies se développeraient dans la cité en raison de la forte densité de population, inhabituelle pour l’époque », poursuit Cyril Zozor. Les maisons ont finalement été vendues à partir de 1929, soit trois ans après leur construction, quand la ville de Pessac a achevé les travaux, et les premiers habitants sont arrivés en 1930.
La septième typologie de maison
Henry Frugès était séduit par l’idée de construire en série, mais a imposé à Le Corbusier de faire en sorte que toutes les maisons soient différentes les unes des autres. Ce que l’architecte a rendu possible par l’utilisation d’un module standard, auquel s’ajoutent une ou plusieurs travées pour varier les constructions. Sept typologies de maisons ont ainsi été créées, dont la maison Gratte-ciel, la maison Isolée, la maison Jumelle, la maison Arcade, la maison Zig-zag et la maison Quinconce. La septième ne porte pas de nom et n’existe plus aujourd’hui : « La seule maison qui correspondait à cette typologie a été détruite pendant la Seconde Guerre mondiale sous les bombardements canadiens visant à détruire la voie de chemin de fer qui reliait Bordeaux à l’Espagne », explique Cyril Zozor. Pour l’anecdote, la maison Isolée porte également le nom de maison Vrinat en rapport avec l’ingénieur qui a accompagné l’architecte et l’industriel dans leur projet. « Henry Vrinat a reçu une maison en guise de rémunération pour son travail. »
Toutes les maisons sont uniques et leur différence est renforcée par la polychromie extérieure de la cité, qui joue sur des impressions d’uniformité et fait disparaître les volumes. « C’est Henry Frugès, le sucrier, qui a demandé à Le Corbusier de colorer la façade des maisons car il trouvait que les réalisations de l’architecte de l’époque, soit principalement les maisons blanches, ressemblaient trop à des morceaux de sucre. Il ne voulait pas être associé au projet de cette manière. »
Henry Frugès était séduit par l’idée de construire en série, mais a imposé à Le Corbusier de faire en sorte que toutes les maisons soient différentes les unes des autres. Ce que l’architecte a rendu possible par l’utilisation d’un module standard, auquel s’ajoutent une ou plusieurs travées pour varier les constructions. Sept typologies de maisons ont ainsi été créées, dont la maison Gratte-ciel, la maison Isolée, la maison Jumelle, la maison Arcade, la maison Zig-zag et la maison Quinconce. La septième ne porte pas de nom et n’existe plus aujourd’hui : « La seule maison qui correspondait à cette typologie a été détruite pendant la Seconde Guerre mondiale sous les bombardements canadiens visant à détruire la voie de chemin de fer qui reliait Bordeaux à l’Espagne », explique Cyril Zozor. Pour l’anecdote, la maison Isolée porte également le nom de maison Vrinat en rapport avec l’ingénieur qui a accompagné l’architecte et l’industriel dans leur projet. « Henry Vrinat a reçu une maison en guise de rémunération pour son travail. »
Toutes les maisons sont uniques et leur différence est renforcée par la polychromie extérieure de la cité, qui joue sur des impressions d’uniformité et fait disparaître les volumes. « C’est Henry Frugès, le sucrier, qui a demandé à Le Corbusier de colorer la façade des maisons car il trouvait que les réalisations de l’architecte de l’époque, soit principalement les maisons blanches, ressemblaient trop à des morceaux de sucre. Il ne voulait pas être associé au projet de cette manière. »
4. La villa Savoye
Coup d’œil
Pour qui a-t-elle été construite ? Pierre Savoye, administrateur d’une compagnie d’assurances, et son épouse
Emplacement : Poissy, France
Date de construction : 1928
Caractéristiques principales : Utilisée comme résidence secondaire par ses propriétaires, elle comprend les cinq points d’une architecture nouvelle formulés par Le Corbusier, soit la structure sur pilotis, le toit-terrasse, le plan libre, la façade libre et les fenêtres en bandeau.
Les premiers échanges entre Le Corbusier et Pierre Savoye sur les plans de la future villa montrent la capacité de l’architecte à imposer ses idées à ses clients. « Le Corbusier a proposé un premier projet que l’assureur a refusé car il le trouvait trop coûteux. Il lui a donc présenté d’autres versions moyennes, dont il savait qu’elles ne séduiraient pas son client, avant d’arriver à lui faire accepter une cinquième proposition bien plus onéreuse que la première », explique Gilles Ragot. De cette manière, l’architecte arrive à aller au-devant de la commande.
Au-delà de ses caractéristiques connues, qui font d’elle une icône de la nouvelle architecture moderne, la villa Savoye a été pensée pour suivre les mouvements de ses usagers. « Le mur et l’avancée du rez-de-chaussée de la maison sont en arrondis. La courbe a été calculée en fonction du rayon de braquage de la voiture de monsieur Savoye, afin de lui permettre de circuler confortablement dans l’espace avec son automobile », raconte par exemple Benoît Cornu, président de l’Association des Sites Le Corbusier.
Coup d’œil
Pour qui a-t-elle été construite ? Pierre Savoye, administrateur d’une compagnie d’assurances, et son épouse
Emplacement : Poissy, France
Date de construction : 1928
Caractéristiques principales : Utilisée comme résidence secondaire par ses propriétaires, elle comprend les cinq points d’une architecture nouvelle formulés par Le Corbusier, soit la structure sur pilotis, le toit-terrasse, le plan libre, la façade libre et les fenêtres en bandeau.
Les premiers échanges entre Le Corbusier et Pierre Savoye sur les plans de la future villa montrent la capacité de l’architecte à imposer ses idées à ses clients. « Le Corbusier a proposé un premier projet que l’assureur a refusé car il le trouvait trop coûteux. Il lui a donc présenté d’autres versions moyennes, dont il savait qu’elles ne séduiraient pas son client, avant d’arriver à lui faire accepter une cinquième proposition bien plus onéreuse que la première », explique Gilles Ragot. De cette manière, l’architecte arrive à aller au-devant de la commande.
Au-delà de ses caractéristiques connues, qui font d’elle une icône de la nouvelle architecture moderne, la villa Savoye a été pensée pour suivre les mouvements de ses usagers. « Le mur et l’avancée du rez-de-chaussée de la maison sont en arrondis. La courbe a été calculée en fonction du rayon de braquage de la voiture de monsieur Savoye, afin de lui permettre de circuler confortablement dans l’espace avec son automobile », raconte par exemple Benoît Cornu, président de l’Association des Sites Le Corbusier.
Le procès de la villa Savoye
Les propriétaires de la villa Savoye se sont plaints de malfaçons. Des lettres écrites par madame Savoye à Le Corbusier font en effet état de fuites dans plusieurs pièces de la maison : « Il pleut dans l’entrée, il pleut dans la rampe et le mur du garage est absolument trempé. D’autre part, il pleut toujours dans ma salle de bains qui est inondée à chaque pluie », peut-on par exemple lire dans l’une d’entre elles, publiée dans Les Heures claires de la villa Savoye, de Jean-Philippe Delhomme et Jean-Marc Savoye. Les multiples demandes de travaux d’assainissement des propriétaires ne trouveront jamais de réponse de la part de Le Corbusier. « Madame Savoye est allée jusqu’à faire un procès à l’architecte, qui est tombé à l’eau lorsque la Seconde Guerre mondiale a éclaté. La villa est devenue un poste de la Gestapo, puis a accueilli des militaires américains avant de devenir un centre de jeunes pour la ville de Poissy. Il a même été question de la démolir pour construire un musée, mais elle a été sauvée par un mouvement populaire. Ce n’est qu’en 1965 qu’André Malraux arrive à la faire classer aux Monuments Historiques. C’est d’ailleurs la première fois qu’un architecte a la satisfaction de savoir que son travail va obtenir cette distinction », raconte Patrick Moser. Le Corbusier était au courant de la décision, mais est mort juste avant qu’elle ne soit officialisée.
Les propriétaires de la villa Savoye se sont plaints de malfaçons. Des lettres écrites par madame Savoye à Le Corbusier font en effet état de fuites dans plusieurs pièces de la maison : « Il pleut dans l’entrée, il pleut dans la rampe et le mur du garage est absolument trempé. D’autre part, il pleut toujours dans ma salle de bains qui est inondée à chaque pluie », peut-on par exemple lire dans l’une d’entre elles, publiée dans Les Heures claires de la villa Savoye, de Jean-Philippe Delhomme et Jean-Marc Savoye. Les multiples demandes de travaux d’assainissement des propriétaires ne trouveront jamais de réponse de la part de Le Corbusier. « Madame Savoye est allée jusqu’à faire un procès à l’architecte, qui est tombé à l’eau lorsque la Seconde Guerre mondiale a éclaté. La villa est devenue un poste de la Gestapo, puis a accueilli des militaires américains avant de devenir un centre de jeunes pour la ville de Poissy. Il a même été question de la démolir pour construire un musée, mais elle a été sauvée par un mouvement populaire. Ce n’est qu’en 1965 qu’André Malraux arrive à la faire classer aux Monuments Historiques. C’est d’ailleurs la première fois qu’un architecte a la satisfaction de savoir que son travail va obtenir cette distinction », raconte Patrick Moser. Le Corbusier était au courant de la décision, mais est mort juste avant qu’elle ne soit officialisée.
5. L’unité d’habitation de Marseille
Coup d’œil
Pour qui a-t-elle été construite ? Le ministère de la Reconstruction
Emplacement : Marseille, France
Date de construction : 1945
Caractéristiques principales : L’immeuble expérimental d’habitation comprend 330 appartements capables de loger entre 1 500 et 1 700 habitants. Il dispose aussi d’une rue commerçante, d’un hôtel-restaurant et d’une terrasse avec école maternelle et équipements sportifs.
Les appartements : Ils sont traversants, avec une double orientation, répartis sur deux niveaux, et leur architecture est simple et rationnelle.
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le ministère de la Reconstruction finance un certain nombre de projets expérimentaux visant à rapprocher l’architecture et l’industrie, dont l’unité d’habitation de Marseille de Le Corbusier. Son caractère expérimental a notamment dispensé l’architecte de permis de construire.
Coup d’œil
Pour qui a-t-elle été construite ? Le ministère de la Reconstruction
Emplacement : Marseille, France
Date de construction : 1945
Caractéristiques principales : L’immeuble expérimental d’habitation comprend 330 appartements capables de loger entre 1 500 et 1 700 habitants. Il dispose aussi d’une rue commerçante, d’un hôtel-restaurant et d’une terrasse avec école maternelle et équipements sportifs.
Les appartements : Ils sont traversants, avec une double orientation, répartis sur deux niveaux, et leur architecture est simple et rationnelle.
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le ministère de la Reconstruction finance un certain nombre de projets expérimentaux visant à rapprocher l’architecture et l’industrie, dont l’unité d’habitation de Marseille de Le Corbusier. Son caractère expérimental a notamment dispensé l’architecte de permis de construire.
L’hôtel gratuit de la Cité radieuse
« Véritable village vertical, le bâtiment repose sur un équilibre entre l’individuel et le collectif. En rassemblant les coûts, Le Corbusier permet aux habitants de disposer d’un certain nombre de services, auxquels ils n’auraient pas eu accès en étant seuls. » explique Gilles Ragot. L’immeuble dispose en effet d’une rue commerçante, d’une laverie, d’un gymnase, d’une école maternelle, d’une scène pour accueillir des représentations théâtrales et d’un hôtel-restaurant. Ce dernier est disponible gratuitement pour les proches des résidents : « Les appartements ne sont pas dotés de chambre d’amis. Elles sont toutes rassemblées au même endroit et forment l’hôtel-restaurant de l’immeuble. L’architecte permet ainsi aux usagers de recevoir leurs proches sans occuper une surface dédiée de leur appartement », explique Patrick Moser.
Les services mis à la disposition des résidents n’étaient toutefois pas assez rentables pour perdurer. « Les commerces ont commencé à rencontrer des difficultés au bout de quelques années, alors que la taille de l’immeuble n’était pas assez importante pour que leur activité fonctionne financièrement. De plus, les habitants commençaient à l’époque à avoir des automobiles et à aller au supermarché », raconte Gilles Ragot. L’unité d’habitation de Marseille aurait cependant permis les premières livraisons à domicile, si répandues aujourd’hui : « Devant chaque appartement se trouve une très grande boîte aux lettres, dont la taille permettait aux commerçants de l’immeuble d’y déposer les commandes de leurs clients. C’était les prémisses d’un concept aujourd’hui démocratisé », précise Benoît Cornu.
« Véritable village vertical, le bâtiment repose sur un équilibre entre l’individuel et le collectif. En rassemblant les coûts, Le Corbusier permet aux habitants de disposer d’un certain nombre de services, auxquels ils n’auraient pas eu accès en étant seuls. » explique Gilles Ragot. L’immeuble dispose en effet d’une rue commerçante, d’une laverie, d’un gymnase, d’une école maternelle, d’une scène pour accueillir des représentations théâtrales et d’un hôtel-restaurant. Ce dernier est disponible gratuitement pour les proches des résidents : « Les appartements ne sont pas dotés de chambre d’amis. Elles sont toutes rassemblées au même endroit et forment l’hôtel-restaurant de l’immeuble. L’architecte permet ainsi aux usagers de recevoir leurs proches sans occuper une surface dédiée de leur appartement », explique Patrick Moser.
Les services mis à la disposition des résidents n’étaient toutefois pas assez rentables pour perdurer. « Les commerces ont commencé à rencontrer des difficultés au bout de quelques années, alors que la taille de l’immeuble n’était pas assez importante pour que leur activité fonctionne financièrement. De plus, les habitants commençaient à l’époque à avoir des automobiles et à aller au supermarché », raconte Gilles Ragot. L’unité d’habitation de Marseille aurait cependant permis les premières livraisons à domicile, si répandues aujourd’hui : « Devant chaque appartement se trouve une très grande boîte aux lettres, dont la taille permettait aux commerçants de l’immeuble d’y déposer les commandes de leurs clients. C’était les prémisses d’un concept aujourd’hui démocratisé », précise Benoît Cornu.
6. La chapelle Notre-Dame-du-Haut
Coup d’œil
Pour qui a-t-elle été construite ? La société immobilière propriétaire des lieux, avec l’appui de la commission diocésaine d’art sacré de Besançon.
Emplacement : Ronchamp, France
Date de construction : 1955
Caractéristiques principales : Les courbes des façades répondent aux formes du paysage vallonné et, à l’intérieur, la lumière est traitée comme un matériau à part entière. Le chemin d’accès est soigné et l’édifice ne se dévoile d’une fois la colline grimpée.
Ce qu’en dit Le Corbusier : « J’ai voulu créer un lieu de silence, de prière, de paix, de joie intérieure. »
La chapelle Notre-Dame-du-Haut de Ronchamp est reconstruite au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, après avoir été détruite lors des batailles de la Libération. « Le Corbusier n’a pas bâti beaucoup d’édifices religieux, mais celui-ci est considéré comme clé dans l’histoire de l’architecture sacrée et marque l’arrivée du modernisme dans les églises », confie Gilles Ragot.
Le parcours qui permet de grimper la colline, où trône la chapelle, est travaillé pour que la découverte de l’édifice ne se fasse qu’après une ascension fatigante dans la forêt. C’est seulement dans le dernier lacet que les courbes de la façade se découvrent, laissant entrevoir la forme étonnante du bâtiment. « Il est recouvert d’une toiture très épaisse qui, depuis l’intérieur, donne l’impression d’être écrasé et place le visiteur dans une position d’humilité », décrit Gilles Ragot.
Qui a cassé le vitrage de la chapelle ?
La façade méridionale de la chapelle est percée d’ouvertures de tailles différentes, qui baignent l’intérieur de lumière. L’un des vitrages, peints par Le Corbusier en personne, a été brisé en janvier 2014 lorsque deux hommes ont tenté de pénétrer dans l’édifice pour voler l’argent du tronc de quête, qui s’est avéré être vide. Ils ont finalement été interpellés et condamnés à un an de prison ferme pour « dégradation de bien classé » et le vitrage a été réparé grâce à un appel aux dons lancé par l’Association pour l’Œuvre de Notre-Dame-du-Haut de Ronchamp. Ce dernier a permis de collecter plus que les 7 500 euros nécessaires à la réparation du vitrage.
Autre modification apportée à la chapelle, le campanile a été réalisé en 1975 par un grand nom de l’architecture française, Jean Prouvé. « Le bâtiment est resté près de vingt ans sans cloches », précise Benoît Cornu. Après la mort de Le Corbusier, le chapelain a commandé un campanile à l’architecte. Trois cloches y sont aujourd’hui maintenues par une structure en métal, dont deux sont d’origine et ont survécu aux bombardements. Elles datent de 1869 et 1936. La troisième a été fondue pour l’occasion.
Coup d’œil
Pour qui a-t-elle été construite ? La société immobilière propriétaire des lieux, avec l’appui de la commission diocésaine d’art sacré de Besançon.
Emplacement : Ronchamp, France
Date de construction : 1955
Caractéristiques principales : Les courbes des façades répondent aux formes du paysage vallonné et, à l’intérieur, la lumière est traitée comme un matériau à part entière. Le chemin d’accès est soigné et l’édifice ne se dévoile d’une fois la colline grimpée.
Ce qu’en dit Le Corbusier : « J’ai voulu créer un lieu de silence, de prière, de paix, de joie intérieure. »
La chapelle Notre-Dame-du-Haut de Ronchamp est reconstruite au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, après avoir été détruite lors des batailles de la Libération. « Le Corbusier n’a pas bâti beaucoup d’édifices religieux, mais celui-ci est considéré comme clé dans l’histoire de l’architecture sacrée et marque l’arrivée du modernisme dans les églises », confie Gilles Ragot.
Le parcours qui permet de grimper la colline, où trône la chapelle, est travaillé pour que la découverte de l’édifice ne se fasse qu’après une ascension fatigante dans la forêt. C’est seulement dans le dernier lacet que les courbes de la façade se découvrent, laissant entrevoir la forme étonnante du bâtiment. « Il est recouvert d’une toiture très épaisse qui, depuis l’intérieur, donne l’impression d’être écrasé et place le visiteur dans une position d’humilité », décrit Gilles Ragot.
Qui a cassé le vitrage de la chapelle ?
La façade méridionale de la chapelle est percée d’ouvertures de tailles différentes, qui baignent l’intérieur de lumière. L’un des vitrages, peints par Le Corbusier en personne, a été brisé en janvier 2014 lorsque deux hommes ont tenté de pénétrer dans l’édifice pour voler l’argent du tronc de quête, qui s’est avéré être vide. Ils ont finalement été interpellés et condamnés à un an de prison ferme pour « dégradation de bien classé » et le vitrage a été réparé grâce à un appel aux dons lancé par l’Association pour l’Œuvre de Notre-Dame-du-Haut de Ronchamp. Ce dernier a permis de collecter plus que les 7 500 euros nécessaires à la réparation du vitrage.
Autre modification apportée à la chapelle, le campanile a été réalisé en 1975 par un grand nom de l’architecture française, Jean Prouvé. « Le bâtiment est resté près de vingt ans sans cloches », précise Benoît Cornu. Après la mort de Le Corbusier, le chapelain a commandé un campanile à l’architecte. Trois cloches y sont aujourd’hui maintenues par une structure en métal, dont deux sont d’origine et ont survécu aux bombardements. Elles datent de 1869 et 1936. La troisième a été fondue pour l’occasion.
7. Les origines du Cabanon
Coup d’œil
Pour qui a-t-il été construit ? Yvonne Jeanneret, la femme de Le Corbusier, et ce dernier
Emplacement : Roquebrune-Cap-Martin, France
Date de construction : 1952
Caractéristiques principales : Sous un toit à pan, une cellule carrée de 15 m² regroupe un coin repos, un coin travail, un coin toilettes et lavabo, une table et des rangements.
Ce qu’en dit Le Corbusier : « J’ai un château sur la Côte d’Azur, qui a 3,66 mètres par 3,66 mètres. C’est pour ma femme, c’est extravagant de confort, de gentillesse. »
Classé aux Monuments Historiques depuis le 3 septembre 1996, le Cabanon de Le Corbusier est le plus petit bâtiment à avoir reçu cette distinction. Loin du « château » décrit par l’architecte, il représente l’aboutissement de ses recherches sur l’habitation minimale et est doté des installations suffisantes et nécessaires pour la vie d’un homme. Tous ses aménagements tiennent dans une surface carrée de 3,66 x 3,66 mètres et de 2,26 mètres de hauteur, calculée selon le Modulor, le système de mesure inventé par Le Corbusier en 1945 et lié à la taille d’un homme. L’espace est dénué de cuisine, alors que le Cabanon est accolé à une guinguette, L’Étoile de Mer. Charles-Édouard Jeanneret-Gris s’est lié d’amitié avec le patron de cette dernière.
Le plan en 15 minutes chrono du Cabanon
L’histoire raconte même que le plan du Cabanon a été dessiné en l’espace de 15 minutes sur un coin de table de ce même restaurant, que Le Corbusier a été l’un des premiers à fréquenter lors de ses séjours dans la villa de la décoratrice Eileen Gray, voisine. « Le 30 décembre 1951, sur un coin de table, dans un petit casse-croûte de la Côte d’Azur, j’ai dessiné pour en faire cadeau à ma femme, pour son anniversaire, les plans d’un cabanon que je construisis l’année suivante sur un bout de rocher battu par les flots. Ces plans (les miens) ont été faits en trois quarts d’heure. Ils sont définitifs ; rien n’a été changé ; grâce au Modulor, la sécurité de la démarche fut totale. Le plan est rectangulaire, la toiture à une pente », selon une citation de Le Corbusier à propos de ce qui deviendra sa maison de vacances. Il y passera tous ses étés jusqu’à sa mort, le 27 août 1965, lors d’une baignade dans la Méditerranée.
Coup d’œil
Pour qui a-t-il été construit ? Yvonne Jeanneret, la femme de Le Corbusier, et ce dernier
Emplacement : Roquebrune-Cap-Martin, France
Date de construction : 1952
Caractéristiques principales : Sous un toit à pan, une cellule carrée de 15 m² regroupe un coin repos, un coin travail, un coin toilettes et lavabo, une table et des rangements.
Ce qu’en dit Le Corbusier : « J’ai un château sur la Côte d’Azur, qui a 3,66 mètres par 3,66 mètres. C’est pour ma femme, c’est extravagant de confort, de gentillesse. »
Classé aux Monuments Historiques depuis le 3 septembre 1996, le Cabanon de Le Corbusier est le plus petit bâtiment à avoir reçu cette distinction. Loin du « château » décrit par l’architecte, il représente l’aboutissement de ses recherches sur l’habitation minimale et est doté des installations suffisantes et nécessaires pour la vie d’un homme. Tous ses aménagements tiennent dans une surface carrée de 3,66 x 3,66 mètres et de 2,26 mètres de hauteur, calculée selon le Modulor, le système de mesure inventé par Le Corbusier en 1945 et lié à la taille d’un homme. L’espace est dénué de cuisine, alors que le Cabanon est accolé à une guinguette, L’Étoile de Mer. Charles-Édouard Jeanneret-Gris s’est lié d’amitié avec le patron de cette dernière.
Le plan en 15 minutes chrono du Cabanon
L’histoire raconte même que le plan du Cabanon a été dessiné en l’espace de 15 minutes sur un coin de table de ce même restaurant, que Le Corbusier a été l’un des premiers à fréquenter lors de ses séjours dans la villa de la décoratrice Eileen Gray, voisine. « Le 30 décembre 1951, sur un coin de table, dans un petit casse-croûte de la Côte d’Azur, j’ai dessiné pour en faire cadeau à ma femme, pour son anniversaire, les plans d’un cabanon que je construisis l’année suivante sur un bout de rocher battu par les flots. Ces plans (les miens) ont été faits en trois quarts d’heure. Ils sont définitifs ; rien n’a été changé ; grâce au Modulor, la sécurité de la démarche fut totale. Le plan est rectangulaire, la toiture à une pente », selon une citation de Le Corbusier à propos de ce qui deviendra sa maison de vacances. Il y passera tous ses étés jusqu’à sa mort, le 27 août 1965, lors d’une baignade dans la Méditerranée.
8. Chandigarh
Coup d’œil
Pour qui a-t-elle vu le jour ? Le Premier ministre Jawaharlal Nehru
Emplacement : Chandigarh, Inde
Date de construction : 1953
Caractéristiques : La ville est découpée en une soixantaine de secteurs résidentiels rectangulaires, séparés par des grandes avenues. Les constructions sont basses, pour répondre au mode de vie indien, et la végétation y est luxuriante.
« S’il a essentiellement construit en France, Le Corbusier est le premier architecte à avoir autant travaillé à l’étranger. Il a réalisé des bâtiments dans onze pays autres que l’Hexagone, ce qu’aucun architecte n’avait fait avant lui », raconte Gilles Ragot. De toutes les villes dessinées par Charles-Édouard Jeanneret-Gris, Chandigarh sera la seule à voir le jour. Après l’indépendance de l’Inde, le Premier ministre de l’époque veut créer des villes nouvelles, dont une capitale pour l’État du Pendjab, coupé en deux par la partition avec le Pakistan, où se trouve l’ancienne capitale. Le gouvernement a d’abord fait appel à l’architecte américain Albert Mayer en 1949 pour dresser un premier plan de la ville, ce qu’il fera avec son confrère Matthew Nowicki. La disparition de ce dernier, mort dans un accident d’avion en 1950, le conduit à abandonner le projet. Les autorités indiennes se tournent alors vers la France pour lui trouver un remplaçant et le ministère de la Reconstruction le met en relation avec Le Corbusier, alors inconnu en Inde à l’époque.
« Le défi était extraordinaire pour Le Corbusier : construire une ville entière pour 500 000 habitants. C’était pour lui l’occasion d’appliquer ses idées très radicales en matière d’urbanisme », poursuit Gilles Ragot. Le résultat est une ville verte située dans une région aride, où les bâtiments de hauteur limitée sont parfois cachés par la végétation. L’architecture y est très simple et permet une ventilation naturelle des lieux. « Le Corbusier a tracé les plans de la ville et réalisé les bâtiments les plus importants constituant le capitole. Le reste était à la charge de son cousin, Pierre Jeanneret. »
Le treizième secteur
La ville est répartie en une soixantaine de secteurs rectangulaires, conçus pour être autonomes. La plupart sont dotés de commerces, écoles et temples accessibles à pied en moins de 10 minutes depuis les habitations. Seule exception, le secteur 13 a volontairement été omis par Le Corbusier, en raison de son caractère superstitieux.
ET VOUS ?
Connaissiez-vous ces anecdotes ? Que pensez-vous du travail de Le Corbusier ? Dites-nous tout dans la partie commentaires ci-dessous !
Lire aussi :
Suivez le Guide : Un studio dans la Cité radieuse de Le Corbusier
Coup d’œil
Pour qui a-t-elle vu le jour ? Le Premier ministre Jawaharlal Nehru
Emplacement : Chandigarh, Inde
Date de construction : 1953
Caractéristiques : La ville est découpée en une soixantaine de secteurs résidentiels rectangulaires, séparés par des grandes avenues. Les constructions sont basses, pour répondre au mode de vie indien, et la végétation y est luxuriante.
« S’il a essentiellement construit en France, Le Corbusier est le premier architecte à avoir autant travaillé à l’étranger. Il a réalisé des bâtiments dans onze pays autres que l’Hexagone, ce qu’aucun architecte n’avait fait avant lui », raconte Gilles Ragot. De toutes les villes dessinées par Charles-Édouard Jeanneret-Gris, Chandigarh sera la seule à voir le jour. Après l’indépendance de l’Inde, le Premier ministre de l’époque veut créer des villes nouvelles, dont une capitale pour l’État du Pendjab, coupé en deux par la partition avec le Pakistan, où se trouve l’ancienne capitale. Le gouvernement a d’abord fait appel à l’architecte américain Albert Mayer en 1949 pour dresser un premier plan de la ville, ce qu’il fera avec son confrère Matthew Nowicki. La disparition de ce dernier, mort dans un accident d’avion en 1950, le conduit à abandonner le projet. Les autorités indiennes se tournent alors vers la France pour lui trouver un remplaçant et le ministère de la Reconstruction le met en relation avec Le Corbusier, alors inconnu en Inde à l’époque.
« Le défi était extraordinaire pour Le Corbusier : construire une ville entière pour 500 000 habitants. C’était pour lui l’occasion d’appliquer ses idées très radicales en matière d’urbanisme », poursuit Gilles Ragot. Le résultat est une ville verte située dans une région aride, où les bâtiments de hauteur limitée sont parfois cachés par la végétation. L’architecture y est très simple et permet une ventilation naturelle des lieux. « Le Corbusier a tracé les plans de la ville et réalisé les bâtiments les plus importants constituant le capitole. Le reste était à la charge de son cousin, Pierre Jeanneret. »
Le treizième secteur
La ville est répartie en une soixantaine de secteurs rectangulaires, conçus pour être autonomes. La plupart sont dotés de commerces, écoles et temples accessibles à pied en moins de 10 minutes depuis les habitations. Seule exception, le secteur 13 a volontairement été omis par Le Corbusier, en raison de son caractère superstitieux.
ET VOUS ?
Connaissiez-vous ces anecdotes ? Que pensez-vous du travail de Le Corbusier ? Dites-nous tout dans la partie commentaires ci-dessous !
Lire aussi :
Suivez le Guide : Un studio dans la Cité radieuse de Le Corbusier
Coup d’œil
Pour qui a-t-elle été construite ? Raoul La Roche, riche collectionneur d’art
Emplacement : Paris, France
Date de construction : 1923
Caractéristiques principales : En forme de L, la maison est composée d’une aile résidentielle et d’une autre dédiée à la galerie de tableaux de son propriétaire. L’espace a été pensé comme une « promenade architecturale ».
La maison La Roche forme un ensemble architectural avec la maison Jeanneret, construite pour le frère de l’architecte et qui abrite aujourd’hui les bureaux de la Fondation Le Corbusier. Les deux bâtiments auraient pu faire partie d’un projet plus vaste car toute la rue dans laquelle ils se trouvent a failli être construite par l’architecte. Un plan avait en effet été proposé à la Banque Immobilière de Paris, en charge de lotir la rue en 1923, mais le projet n’a pas abouti et seules deux maisons ont été construites. Avant-gardistes avec leurs formes géométriques, elles posent les bases de l’architecture moderne et sont dotées de trois des cinq points d’une architecture nouvelle définis par Le Corbusier quelques années plus tard, en 1927 : le toit-terrasse, les pilotis et les fenêtres en longueur. Le plan libre et la façade libre compléteront ensuite cette liste.
Les malfaçons de la maison La Roche
S’il est à l’origine de la renommée internationale de la maison La Roche, son caractère novateur a aussi été la cause de plusieurs problèmes pour ses propriétaires. Quelques années après sa construction, le bâtiment souffre de malfaçons qui obligent M. et Mme La Roche à dépenser davantage dans des travaux de rénovation.