Portrait d'artisan : Laure Simoneau, sculptrice sur le fil
Cette artiste jongle avec l'acier, les pleins et les vides, à la manière d'un funambule
Fildefériste : c’est ainsi que la sculptrice Laure Simoneau aime définir son métier. Elle qui, à 44 ans, peut se targuer d’avoir opéré une reconversion réussie dans l’univers de l’artisanat d’art, il y a seulement quatre ans. Manipulant le fil d’acier à plaisir, la jeune artiste a déjà reçu plusieurs prix qui l’encouragent à persévérer, dans un univers créatif aussi métallique que poétique.
Comment l’idée de devenir fildefériste vous est-elle venue ?
Tout à fait par hasard, en réalité ! Cela date d’il y a 25 ans. Alors que je faisais jouer mon petit frère, je suis tombée sur des fils de fer et j’ai commencé à jouer avec cette matière, pour lui fabriquer des jouets. Puis j’ai hésité entre les Beaux-Arts et le social, et j’ai pris une année de réflexion où je me suis consacrée à la culture. À vingt ans, je n’ai pas eu le courage de me consacrer à mon art et suis finalement devenue éducatrice et thérapeute familiale. Entre mes enfants et mon métier, j’étais débordée par ma vie et n’avais pas l’énergie de continuer à me consacrer à la création artistique.
Tout à fait par hasard, en réalité ! Cela date d’il y a 25 ans. Alors que je faisais jouer mon petit frère, je suis tombée sur des fils de fer et j’ai commencé à jouer avec cette matière, pour lui fabriquer des jouets. Puis j’ai hésité entre les Beaux-Arts et le social, et j’ai pris une année de réflexion où je me suis consacrée à la culture. À vingt ans, je n’ai pas eu le courage de me consacrer à mon art et suis finalement devenue éducatrice et thérapeute familiale. Entre mes enfants et mon métier, j’étais débordée par ma vie et n’avais pas l’énergie de continuer à me consacrer à la création artistique.
Mais il y a quatre ans, tout a basculé… Pourquoi ?
En effet, j’ai tout arrêté pour renouer avec ce choix de vie. J’ai suivi l’un des traitements de ma sœur qui est chaman et je me suis aperçue qu’il y avait chez moi quelque chose que je n’avais pas développé. Je n’ai pas immédiatement pensé à reprendre le travail du fil. J’ai commencé par prendre une année de réflexion et d’expérimentation dans la culture. En attendant, j’avais mis mes anciennes sculptures en fil de fer sur mon site. Une décoratrice m’a démarchée et je me suis remise à créer. Rapidement, j’ai postulé à des salons et le succès de mes sculptures m’a montré la voie. J’ai pris conscience que j’avais quelque chose dans les doigts. Pour le reste, je suis autodidacte, je n’ai suivi qu’une semaine de stage de soudure il y a trois ans. J’ai fait mes armes librement, en avançant toute seule.
En effet, j’ai tout arrêté pour renouer avec ce choix de vie. J’ai suivi l’un des traitements de ma sœur qui est chaman et je me suis aperçue qu’il y avait chez moi quelque chose que je n’avais pas développé. Je n’ai pas immédiatement pensé à reprendre le travail du fil. J’ai commencé par prendre une année de réflexion et d’expérimentation dans la culture. En attendant, j’avais mis mes anciennes sculptures en fil de fer sur mon site. Une décoratrice m’a démarchée et je me suis remise à créer. Rapidement, j’ai postulé à des salons et le succès de mes sculptures m’a montré la voie. J’ai pris conscience que j’avais quelque chose dans les doigts. Pour le reste, je suis autodidacte, je n’ai suivi qu’une semaine de stage de soudure il y a trois ans. J’ai fait mes armes librement, en avançant toute seule.
Pensez-vous que votre parcours transparaît dans vos créations ?
J’ai trouvé un équilibre entre ces deux orientations de vie et me remets aujourd’hui à assumer mon parcours en son entier. Et mon expérience professionnelle sert en effet mon expression créative. Quelque part, je suis encore dans le soin à travers mes sculptures.
En travaillant dans le social, on vit des choses tellement difficiles que l’on a tendance à refermer les portes de sa sensibilité. Je ne suis plus dans ce danger-là, mes sculptures traduisent mes émotions passées et présentes, que je peux de nouveau exprimer sans risquer de m’écrouler. Mon objectif ? C’est presque de pleurer lorsque je termine une sculpture. Non pas parce qu’elle est triste, mais parce que je ressens toute l’émotion qu’elle dégage.
J’ai trouvé un équilibre entre ces deux orientations de vie et me remets aujourd’hui à assumer mon parcours en son entier. Et mon expérience professionnelle sert en effet mon expression créative. Quelque part, je suis encore dans le soin à travers mes sculptures.
En travaillant dans le social, on vit des choses tellement difficiles que l’on a tendance à refermer les portes de sa sensibilité. Je ne suis plus dans ce danger-là, mes sculptures traduisent mes émotions passées et présentes, que je peux de nouveau exprimer sans risquer de m’écrouler. Mon objectif ? C’est presque de pleurer lorsque je termine une sculpture. Non pas parce qu’elle est triste, mais parce que je ressens toute l’émotion qu’elle dégage.
Avez-vous rapidement acquis un atelier ?
L’une de mes chances est d’avoir eu mon atelier tout de suite. En réalité, il est juste en dessous de chez moi, puisque j’ai transformé mon ancienne buanderie en espace de création. J’y suis bien. Il y fait certes un peu chaud en été et un peu froid en hiver, mais il me semble que les ateliers sont toujours un peu comme ça.
Quels matériaux utilisez-vous pour créer vos sculptures ?
Du fil de fer, évidemment, des plaques en acier pour mes socles et récemment, j’ai expérimenté le travail de la feuille d’or, pour habiller mon fil de métal. Cela donne des reflets précieux qui mettent en valeur le martelage de mon fil.
Le fil recuit que j’utilise principalement n’est pas en soi une belle matière. Mais quand on l’écrase, il chauffe, évolue et devient presque vivant.
L’une de mes chances est d’avoir eu mon atelier tout de suite. En réalité, il est juste en dessous de chez moi, puisque j’ai transformé mon ancienne buanderie en espace de création. J’y suis bien. Il y fait certes un peu chaud en été et un peu froid en hiver, mais il me semble que les ateliers sont toujours un peu comme ça.
Quels matériaux utilisez-vous pour créer vos sculptures ?
Du fil de fer, évidemment, des plaques en acier pour mes socles et récemment, j’ai expérimenté le travail de la feuille d’or, pour habiller mon fil de métal. Cela donne des reflets précieux qui mettent en valeur le martelage de mon fil.
Le fil recuit que j’utilise principalement n’est pas en soi une belle matière. Mais quand on l’écrase, il chauffe, évolue et devient presque vivant.
Le petit prince
Quelles sont les étapes de création par lesquelles vous passez systématiquement ?
Au début, je suis beaucoup passée par le dessin. Mais plus ça va, moins je dessine. Car mon univers, c’est avant tout le fil ! Lorsque je m’adonne préalablement au dessin, cela me limite, dans la mesure où je me sens obligée de suivre le tracé initial. Or, un dessin ne rend pas compte du volume qu’il peut y avoir dans une sculpture. Désormais, je préfère donc manipuler directement le fil recuit et malléable, que je martèle sur l’enclume. Ensuite, j’entre dans une phase de montage de ma sculpture, en effectuant des soudures en argent qui exigent beaucoup de minutie.
Paradoxalement, je cherche à concevoir des sculptures en fil de fer en utilisant le moins de fil possible. Car c’est le vide qui m’intéresse davantage. D’où le caractère épuré de mes créations, le fil délimitant un espace vide auquel il donne une véritable consistance.
Au début, je suis beaucoup passée par le dessin. Mais plus ça va, moins je dessine. Car mon univers, c’est avant tout le fil ! Lorsque je m’adonne préalablement au dessin, cela me limite, dans la mesure où je me sens obligée de suivre le tracé initial. Or, un dessin ne rend pas compte du volume qu’il peut y avoir dans une sculpture. Désormais, je préfère donc manipuler directement le fil recuit et malléable, que je martèle sur l’enclume. Ensuite, j’entre dans une phase de montage de ma sculpture, en effectuant des soudures en argent qui exigent beaucoup de minutie.
Paradoxalement, je cherche à concevoir des sculptures en fil de fer en utilisant le moins de fil possible. Car c’est le vide qui m’intéresse davantage. D’où le caractère épuré de mes créations, le fil délimitant un espace vide auquel il donne une véritable consistance.
Tendre Baiser
Ici, vous faites clairement référence au Baiser de Klimt. Quelles sont vos sources d’inspiration en général et dans quel cadre avez-vous réalisé cette sculpture en particulier ?
Ce qui m’inspire, c’est ce qui me touche. Mon histoire m’a habituée à être dans l’empathie et nourrit ma créativité, comme les rencontres que je peux faire. J’ai toujours aimé Klimt et la délicatesse de ses lignes m’émeut, d’où ma série faisant référence à son œuvre.
Ce qui m’inspire, c’est ce qui me touche. Mon histoire m’a habituée à être dans l’empathie et nourrit ma créativité, comme les rencontres que je peux faire. J’ai toujours aimé Klimt et la délicatesse de ses lignes m’émeut, d’où ma série faisant référence à son œuvre.
Charlotte
Qu’en est-il de votre série sur Charlotte Salomon ?
Par hasard j’ai lu Charlotte de Foenkinos, que ma libraire m’avait conseillée. J’ai été touchée par l’histoire familiale et l’œuvre d’inspiration chagalienne de cette peintre allemande et juive, morte à Auschwitz en 1943. J’ai donc éprouvé l’envie d’entrer dans son univers, notamment en faisant son portrait en fil de fer. Tous les ans, j’expose une grande et une petite sculptures dans les salons du Grand Palais. Cette année, je pense y présenter une sculpture de Charlotte.
Par hasard j’ai lu Charlotte de Foenkinos, que ma libraire m’avait conseillée. J’ai été touchée par l’histoire familiale et l’œuvre d’inspiration chagalienne de cette peintre allemande et juive, morte à Auschwitz en 1943. J’ai donc éprouvé l’envie d’entrer dans son univers, notamment en faisant son portrait en fil de fer. Tous les ans, j’expose une grande et une petite sculptures dans les salons du Grand Palais. Cette année, je pense y présenter une sculpture de Charlotte.
Amy
Dans un tout autre genre, vous avez évoqué Amy Winehouse…
En effet. L’autre jour, je suis tombée sur une vidéo d’elle, écouter ses chansons me fait pleurer. J’ai donc voulu lui rendre hommage avec une sculpture.
En effet. L’autre jour, je suis tombée sur une vidéo d’elle, écouter ses chansons me fait pleurer. J’ai donc voulu lui rendre hommage avec une sculpture.
Le souffle de l'ange
La thématique du couple est également présente dans votre travail…
J’ai imaginé une série autour du couple, dont Le Souffle de l’ange fait partie. Le Baiser de Klimt a terminé cet ensemble de sculptures, car je me suis aperçue que mes couples ne s’étaient jamais embrassés. Ici, je fais référence à cette anecdote qui raconte qu’un ange passe avant qu’on naisse, pour ne pas que l’on se souvienne des vies d’avant, en posant un doigt sur notre bouche. Lequel serait à l’origine du creux qui caractérise notre lèvre supérieure.
J’ai imaginé une série autour du couple, dont Le Souffle de l’ange fait partie. Le Baiser de Klimt a terminé cet ensemble de sculptures, car je me suis aperçue que mes couples ne s’étaient jamais embrassés. Ici, je fais référence à cette anecdote qui raconte qu’un ange passe avant qu’on naisse, pour ne pas que l’on se souvienne des vies d’avant, en posant un doigt sur notre bouche. Lequel serait à l’origine du creux qui caractérise notre lèvre supérieure.
Sculpture murale, Ô Chateau , bar à vin Paris 1er
Vous intervenez parfois pour parfaire une ambiance déco…
Oui, comme je fais des sculptures qui peuvent habiller des murs, meubles ou étagères, je suis très en lien avec l’univers de la déco. Ici, j’ai réalisé une grande sculpture pour le bar à vins Ô Château, qui se trouve dans le Ier arrondissement de Paris.
ET VOUS ?
Que pensez-vous de ces sculptures en fil de fer ?
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Lorsque je donne ma carte de visite, les gens lisent sculpteur tout bas et fildefériste à voix haute. Comme s’ils avaient besoin de savoir ce que ça veut dire, sans doute parce que c’est un joli mot dont on a envie de s’imprégner.
Moi, je l’entends un peu comme une « funambule ». Je trouve cette image adaptée à l’idée que je me fais d’un travail sur le fil, très lié à la notion d’équilibre. Ce mot fait parfaitement écho à mon parcours. Toute petite, j’ai fait l’école de cirque parce que je rêvais de devenir clown. Finalement, je suis devenue fildefériste autrement, c’est ma manière de jouer l’équilibriste. La touche féminine et poétique que j’ajoute au travail de sculpteur.