Découverte Houzz : Marie Benattar ou l'art de savoir célébrer les corps
Immersion dans l'univers fantasque, audacieux, géométrique et coloré d'une jeune artiste on ne peut plus inspirée
À seulement 30 ans, Marie Benattar est une photographe passionnante qui pourrait se targuer d’une œuvre déjà dense, mais reste élégamment sur la réserve. Avec elle, l’échange est agréable et facile. Un peu intimidée lorsqu’il s’agit de parler d’elle et de son parcours, ses yeux brillent dès lors qu’elle raconte, avec ferveur, son métier d’artiste.
Originaire de l’île de la Réunion, Marie a un cursus atypique, puisque c’est à Bali, où elle part vivre avec sa mère à 19 ans, qu’elle apprend tout d’abord la peinture aux côtés d’artistes indonésiens. Pour continuer son apprentissage des arts plastiques, elle décide de mettre le cap sur l’Europe, fait les Beaux-Arts de Clermont-Ferrand puis suit une seconde formation dans une école de photographie parisienne, l’EFET. Flirtant pour chacune de ses images avec une nouvelle réalité, atemporelle, audacieuse et rafraîchissante, Marie oscille entre travail de commandes et de création. « Les commandes émanent plutôt de jeunes créateurs de mode, mais en général ma créativité n’est pas bridée. On me laisse, même dans ce cadre, donner libre cours à mes idées », précise-t-elle. Côté création, elle ne s’arrête jamais, mue par une insatiable envie d’explorer de nouveaux univers qui n’appartiennent qu’à elle. En résultent des œuvres explosives et tendres, fantaisistes et teintées d’onirisme, dans lesquelles la géométrie des formes rencontre la sensualité de corps, joyeusement sublimés.
Athlète de foire taquinant la muse
Le jour où… tu as eu envie de faire ce métier
C’est un métier que je continue à construire, jour après jour. Chacune des expériences que je vis par ce biais contribue, petit à petit, à définir mon parcours artistique. On me fait confiance et cela m’encourage. Cela ne s’est pas fait en une fois. Au départ, j’étais dans la créativité, dans mon univers et dans une volonté de réussir à projeter mes idées dans mon art. Mais tout évolue sans cesse, à mesure que j’avance et m’approprie mon propre cheminement.
C’est un métier que je continue à construire, jour après jour. Chacune des expériences que je vis par ce biais contribue, petit à petit, à définir mon parcours artistique. On me fait confiance et cela m’encourage. Cela ne s’est pas fait en une fois. Au départ, j’étais dans la créativité, dans mon univers et dans une volonté de réussir à projeter mes idées dans mon art. Mais tout évolue sans cesse, à mesure que j’avance et m’approprie mon propre cheminement.
Athlète de foire taquinant la muse
Le jour où… tu as décroché ton diplôme
J’ai d’abord reçu un premier diplôme, mon DNAP (Diplôme National d’Arts Plastiques), aux Beaux-Arts de Clermont-Ferrand en 2008. Mais j’ai davantage été marquée par la réception, en 2010, d’un diplôme délivré par l’école de photographie parisienne, l’EFET. Plus jeune, j’avais rencontré des difficultés à l’école et là, j’étais major de promotion ! Ce qui a été incroyable, c’est que le jour de la remise, j’ai dû me dépêcher pour courir juste après jusqu’à la
place Vendôme, où l’on m’a décerné, le même jour, le prix Mark Grosset. C’était une journée vraiment exceptionnelle… Je crois qu’on n’en a pas deux comme ça dans une vie !
J’ai d’abord reçu un premier diplôme, mon DNAP (Diplôme National d’Arts Plastiques), aux Beaux-Arts de Clermont-Ferrand en 2008. Mais j’ai davantage été marquée par la réception, en 2010, d’un diplôme délivré par l’école de photographie parisienne, l’EFET. Plus jeune, j’avais rencontré des difficultés à l’école et là, j’étais major de promotion ! Ce qui a été incroyable, c’est que le jour de la remise, j’ai dû me dépêcher pour courir juste après jusqu’à la
place Vendôme, où l’on m’a décerné, le même jour, le prix Mark Grosset. C’était une journée vraiment exceptionnelle… Je crois qu’on n’en a pas deux comme ça dans une vie !
Valse Turque
Le jour où… tu as basculé dans la photo
Depuis toute petite, j’ai toujours entretenu un lien étroit avec la photographie. Ma mère et mon grand-père, qui étaient passionnés de photographie, me faisaient poser pour eux et j’aimais ça. À Bali, je faisais des instantanées. Mais c’est en France que ma peinture a progressivement évolué vers la performance, puis la photographie.
Aux Beaux-Arts, j’ai fait de grandes peintures en bois, desquelles émergeaient par des trous des membres vivants : un bras, une jambe, etc. J’étais à la recherche d’une sorte d’interaction entre l’espace fictif de la peinture et le caractère vivant des corps. La photo s’est alors naturellement imposée à moi comme moyen de témoigner du dispositif.
Depuis toute petite, j’ai toujours entretenu un lien étroit avec la photographie. Ma mère et mon grand-père, qui étaient passionnés de photographie, me faisaient poser pour eux et j’aimais ça. À Bali, je faisais des instantanées. Mais c’est en France que ma peinture a progressivement évolué vers la performance, puis la photographie.
Aux Beaux-Arts, j’ai fait de grandes peintures en bois, desquelles émergeaient par des trous des membres vivants : un bras, une jambe, etc. J’étais à la recherche d’une sorte d’interaction entre l’espace fictif de la peinture et le caractère vivant des corps. La photo s’est alors naturellement imposée à moi comme moyen de témoigner du dispositif.
Les égoistes rue de levis
Dans la continuité de ce travail, j’ai commencé à faire intervenir des modèles pour créer des mises en scène sur des façades.
J’ai sorti cette image – qui fait davantage référence à l’univers de la mode – lorsque je suis arrivée sur Paris, soit après mes trois années aux Beaux-Arts de Clermont-Ferrand.
J’ai pris beaucoup de plaisir à la faire. L’exercice était sportif et ludique, avec une vraie dimension collective. Aujourd’hui, je trouve néanmoins cette photo un peu maladroite, parce qu’elle m’évoque une forme d’hyperbole de la théâtralité. Mais dans le même temps, je l’affectionne… Elle me ramène à un joli souvenir et fonctionne pour moi comme le symbole d’un premier challenge.
J’ai sorti cette image – qui fait davantage référence à l’univers de la mode – lorsque je suis arrivée sur Paris, soit après mes trois années aux Beaux-Arts de Clermont-Ferrand.
J’ai pris beaucoup de plaisir à la faire. L’exercice était sportif et ludique, avec une vraie dimension collective. Aujourd’hui, je trouve néanmoins cette photo un peu maladroite, parce qu’elle m’évoque une forme d’hyperbole de la théâtralité. Mais dans le même temps, je l’affectionne… Elle me ramène à un joli souvenir et fonctionne pour moi comme le symbole d’un premier challenge.
Du journal au roseau
Le jour où… tu as trouvé ton style
Je ne sais pas si j’ai un style à proprement parler, même si c’est ce que les autres me renvoient. Mais je pense effectivement qu’il y a une certaine continuité dans mon travail. Et que des liens se créent et se tissent, d’une photo à l’autre, jusqu’à donner le sentiment d’être devant une histoire. C’est assez progressif mais il est vrai qu’à chaque fois que je fais une photo, une trajectoire se dessine. Je crois que je me raconte par bribes et que mes images sont peut-être, in fine, les fragments d’une histoire personnelle.
Je ne sais pas si j’ai un style à proprement parler, même si c’est ce que les autres me renvoient. Mais je pense effectivement qu’il y a une certaine continuité dans mon travail. Et que des liens se créent et se tissent, d’une photo à l’autre, jusqu’à donner le sentiment d’être devant une histoire. C’est assez progressif mais il est vrai qu’à chaque fois que je fais une photo, une trajectoire se dessine. Je crois que je me raconte par bribes et que mes images sont peut-être, in fine, les fragments d’une histoire personnelle.
Le jour où… tu as trouvé la juste démarche
Au début, mes recherches étaient très formelles et c’est peu à peu que la dimension narrative s’est installée. Cela se voit d’ailleurs dans cette série, dont les personnages, pensés comme des symboles, racontent des histoires, seuls et réunis dans la composition.
J’ai une démarche plastique qui me conduit à convoquer des formes et des matériaux. Puis, à mesure que je cherche l’équilibre de la composition, un sens apparaît. Un sens qui semble pouvoir basculer à tout moment.
Au début, mes recherches étaient très formelles et c’est peu à peu que la dimension narrative s’est installée. Cela se voit d’ailleurs dans cette série, dont les personnages, pensés comme des symboles, racontent des histoires, seuls et réunis dans la composition.
J’ai une démarche plastique qui me conduit à convoquer des formes et des matériaux. Puis, à mesure que je cherche l’équilibre de la composition, un sens apparaît. Un sens qui semble pouvoir basculer à tout moment.
Interstice
Le jour où… tu as trouvé ton premier modèle
Au début, j’ai aimé travailler avec l’une de mes amies. C’était une ancienne danseuse avec beaucoup de charisme. C’était parfait pour moi, car il n’y avait aucun maniérisme chez elle, mais une vraie conscience du corps.
Au début, j’ai aimé travailler avec l’une de mes amies. C’était une ancienne danseuse avec beaucoup de charisme. C’était parfait pour moi, car il n’y avait aucun maniérisme chez elle, mais une vraie conscience du corps.
Des nouvelles de Venus
L’une des problématiques à relever, avec un modèle vivant, c’est qu’à moins de le laisser toujours nu, il faut l’habiller. Or, j’évite au maximum de travailler avec des vêtements qui risquent de donner à ma photo une coloration temporelle, de la rattacher à un style, une mode ou une époque. Ce qui m’intéresse, c’est le caractère abstrait du vêtement bricolé, souvent de papier. Cela permet de revêtir le corps d’une forme libre en soi, plus favorable à une interprétation libre. En ce moment, je doute néanmoins car je crains aussi de tomber dans l’idée du costume. Mais tout cela est encore un peu confus…
Corolle
Le jour où… tu as douté
Je doute constamment… Tous les jours. Mais parfois, il y a de petits indices positifs qui m’arrivent, me réconfortent et me redonnent confiance. Paradoxalement, il me semble qu’en dépit de ces doutes qui me traversent continuellement, j’ai, enfouie en moi, une sorte de profonde confiance ou croyance en ce que je fais.
Je doute constamment… Tous les jours. Mais parfois, il y a de petits indices positifs qui m’arrivent, me réconfortent et me redonnent confiance. Paradoxalement, il me semble qu’en dépit de ces doutes qui me traversent continuellement, j’ai, enfouie en moi, une sorte de profonde confiance ou croyance en ce que je fais.
Le jour où… tu as vendu ton travail pour la première fois
La première photo que j’ai vendue s’intitule Athlète de foire taquinant une muse-04. J’ai été flattée ! Car elle m’a été achetée par un cabinet d’affaires basé à l’hôtel de Talleyrand, place de la Concorde. Pour moi, le contraste était saisissant lorsque je suis arrivée, avec mon œuvre sous le bras, pour la céder dans un endroit aussi prestigieux. Cela m’a émue qu’un lieu chargé d’histoire puisse accueillir mon travail.
La première photo que j’ai vendue s’intitule Athlète de foire taquinant une muse-04. J’ai été flattée ! Car elle m’a été achetée par un cabinet d’affaires basé à l’hôtel de Talleyrand, place de la Concorde. Pour moi, le contraste était saisissant lorsque je suis arrivée, avec mon œuvre sous le bras, pour la céder dans un endroit aussi prestigieux. Cela m’a émue qu’un lieu chargé d’histoire puisse accueillir mon travail.
Soudain l'été prochain
De manière générale, vendre ne me pose pas de problème. J’imagine que c’est plus difficile de se séparer d’une pièce unique. Mais comme je fais huit tirages de chacune de mes photographies, cela me laisse du temps. Et la possibilité d’en garder un exemplaire si je le souhaite. J’ai le sentiment de semer de cette façon mes images çà et là, dans des environnements uniques et différents. Cela amène un nouveau rebondissement dans la vie d’un travail que l’on croyait terminé et permet parfois de faire de belles rencontres.
Oeuvres numérotées @Marie Benattar
Le jour où… tu as fait ta première exposition en solo
À l’occasion du mois de la photographie, en novembre 2014, j’ai été invitée à exposer dans l’atelier Yann Arthus-Bertrand, dans le VIᵉ arrondissement de Paris. Ça a été une très belle surprise ! J’étais en Inde lorsque j’ai reçu son e-mail et je ne m’y attendais tellement pas que j’ai d’abord cru à un spam. Heureusement, mon invitation chez ce maître de la photo s’est avérée bien réelle.
À l’occasion du mois de la photographie, en novembre 2014, j’ai été invitée à exposer dans l’atelier Yann Arthus-Bertrand, dans le VIᵉ arrondissement de Paris. Ça a été une très belle surprise ! J’étais en Inde lorsque j’ai reçu son e-mail et je ne m’y attendais tellement pas que j’ai d’abord cru à un spam. Heureusement, mon invitation chez ce maître de la photo s’est avérée bien réelle.
La balancoire
Le jour où… ton travail t’a permis de rencontrer quelqu’un que tu admires
C’est encore tout frais ! J’ai rencontré Jean-Paul Goude au festival de la photo d’Arles en juillet. On aurait dit un personnage mythique. On a eu un premier échange rapide car il a été sollicité et je n’ai pas voulu m’imposer. Mais j’avoue être littéralement revenue à la charge. Et je ne l’ai pas regretté !
ET VOUS ?
Que pensez-vous du parcours et du travail de Marie Benattar ?
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C’est encore tout frais ! J’ai rencontré Jean-Paul Goude au festival de la photo d’Arles en juillet. On aurait dit un personnage mythique. On a eu un premier échange rapide car il a été sollicité et je n’ai pas voulu m’imposer. Mais j’avoue être littéralement revenue à la charge. Et je ne l’ai pas regretté !
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